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Parasitisme digestif ches les ovins/caprins: vers une approche ciblée et raisonnée

Forte de nombreuses années de monitoring du parasitisme digestif dans plusieurs dizaines de troupeaux de petits ruminants et confortée par les résultats du récent projet GPS « Résistance aux anthelminthiques », l’Arsia poursuit sa campagne de sensibilisation aux bonnes pratiques de gestion du parasitisme digestif dans les troupeaux ovins et caprins. Du travail à accomplir, il y en a mais le dynamisme des éleveurs à tendre vers une approche ciblée et raisonnée doit être souligné !

Temps de lecture : 6 min

Le projet Gestion Prévention Santé (GPS) mené de front durant la saison 2021-2022 par l’Arsia et la DGZ s’est tout d’abord attaché à relever les pratiques de gestion du parasitisme digestif dans les élevages ovins et caprins. Quelque 90 éleveurs ont répondu à cette enquête dont les résultats édifiants, pour ne pas dire interpellants, sont ici présentés de manière condensée.

 # 1 : Le parasitisme digestif, dans le « top 3 » des causes de morbidité

Les parasitoses gastro-intestinales, et ce n’est pas une surprise, font partie des principales causes de maladie dans les élevages de petits ruminants. Qu’il s’agisse des moutons ou des chèvres, aucun doute : l’animal à l’herbe est inéluctablement confronté aux parasites, et c’est là une problématique de santé majeure pour les éleveurs répondants.

Cet élément est par ailleurs appuyé par le relevé des visites opérées par le staff vétérinaire de l’Arsia dans les troupeaux ovins et caprins durant l’année 2022. Comme le précise la figure 1, la thématique du parasitisme digestif concerne près de 75 % des visites réalisées.

Figure 1: Répartition de visites ovines et caprines par motif (année 2022; n=68).
Figure 1: Répartition de visites ovines et caprines par motif (année 2022; n=68).

 # 2 : Près de 3 éleveurs sur 4 vermifugent systématiquement tous leurs animaux

Voulant agir par précaution, tradition voire par facilité logistique, très (trop) nombreux sont celles et ceux qui prennent la décision de sortir l’arme pharmaceutique à hauteur collective. Et pourtant… Le monitoring de l’infestation parasitaire dans un lot/troupeau démontre fréquemment de grandes variabilités individuelles. Si l’approche « vermifugation collective » était autrefois enseignée, nul ne peut ignorer qu’aujourd’hui il s’agit d’un des facteurs conduisant à l’explosion de la résistance des vers aux molécules censées les éliminer.

Si le traitement « individualisé » peut sembler une stratégie plus complexe à mettre en place, elle n’est pas pour autant plus compliquée à déployer. Un échantillonnage réalisé dans le troupeau (min. 10 à 15 % des individus), une évaluation quantifiée du degré d’infestation (analyse coprologique) et une observation des 5 points de contrôle sur l’animal (voir figure 2) permettent de travailler « au cas par cas », ou tout du moins par homologie de profil.

Figure 2: Points d’observation de signes cliniques compatibles avec une infestation parasitaire.
Figure 2: Points d’observation de signes cliniques compatibles avec une infestation parasitaire.

 # 3 : Près de 30 % des éleveurs associent « diarrhée » et « parasitisme digestif »

Bon à savoir : tout type de parasite digestif n’entraîne pas de la diarrhée (c’est dépendant de sa localisation dans le tube digestif de l’animal) et… toute diarrhée n’est pas forcément d’origine parasitaire… Alors, attention au raccourci qui tendrait à vermifuger tout individu présentant un arrière-train sale. Il faut objectiver le tableau clinique et, pour ce faire, rien de tel qu’un prélèvement de matières fécales pour analyse coprologique.

Malheureusement, l’enquête révèle que 50 % des répondants n’ont jamais réalisé ce type d’analyse.

 # 4 : Seul 1 éleveur sur 4 ajuste la dose de vermifuge en fonction du poids réel de l’animal

Que celui qui n’a jamais vermifugé son troupeau sur base d’une estimation à l’œil du poids de sa bête jugée la plus lourde nous jette la première crotte ! Soyons honnêtes, si l’adaptation de la dose de produit en fonction du poids individuel est un principe de bonne conduite, il n’est pas toujours évident de l’appliquer. Grandes s’ouvrent alors les portes du sous-dosage, du manque d’efficacité de la molécule antiparasitaire et du phénomène de résistance des vers… Quelques éléments dits de bonnes pratiques à retenir :

– peser au moins l’animal le plus lourd tu devras ;

– … idéalement tous les individus tu essaieras ;

– contrôler régulièrement la calibration de ton dispositif d’administration tu n’oublieras pas !

  # 5 : Plus d’1 éleveur sur 2 suspecte une baisse d’efficacité de vermifuge

Et il y a de quoi s’inquiéter. Alors, bien entendu, il s’agit là d’une impression de l’éleveur sur l’efficacité du produit administré. Aucun contrôle en bonne et due forme là derrière mais c’est tout de même un fait interpellant. Cette supposition de perte d’efficacité est liée à la non disparition des signes de parasitoses (ex : amaigrissement, diarrhée) et/ou à la nécessité d’employer une seconde dose de produit pour constater une amélioration de l’état de l’animal. Vous vous reconnaissez là-dedans ? Alors, il y a matière à gratter plus loin et évaluer de manière « cadrée » l’efficacité du ou des vermifuge(s) que vous employez. Plus de 3 éleveurs sur 4 parmi les répondants ne l’ont jamais fait : n’hésitez pas à sortir du lot !

Si l’adaptation de la dose de produit en fonction du poids individuel est un principe  de bonne conduite, il n’est pas toujours évident de l’appliquer.
Si l’adaptation de la dose de produit en fonction du poids individuel est un principe de bonne conduite, il n’est pas toujours évident de l’appliquer. - P-Y L.

L’efficacité des produits vermifuges à la loupe

Dans 20 troupeaux ovins et caprins, le projet GPS s’est attaché à évaluer le degré d’efficacité des molécules antiparasitaires employées selon le test évoqué ci-dessous mais aussi à décrypter quelles étaient les modalités d’emploi potentiellement associées à l’inefficacité du produit. Les résultats sont sans appel :

– dans 40 % des troupeaux testés, le produit antiparasitaire s’est révélé inefficace ;

– au moins un résultat traducteur d’inefficacité a été obtenu dans chaque famille de produits antiparasitaires.

– les troupeaux dans lesquels une inefficacité du produit a été démontrée étaient ceux où :

– les animaux étaient vermifugés trois fois ou plus par an ;

– aucune pesée n’était réalisée pour adapter la posologie ;

– un produit destiné à lutter contre les parasites digestifs était appliqué en pour-on sur la ligne du dos de l’animal.

Ces résultats appuient de nombreuses études sur le sujet qui, toutes, soulignent l’importance de la mise en place d’une stratégie de gestion individualisée et raisonnée et d’un respect de la posologie pour préserver l’arsenal thérapeutique (limité, il faut le dire). Les résistances des parasites aux substances antiparasitaires apparaissent bien plus rapidement que des nouvelles molécules sur le marché.

Une note également sur l’application des substances dites pour-on à des fins de lutte contre le parasitisme digestif : leur biodisponibilité (fraction de produit disponible et active dans le système ciblé) est souvent réduite, ce qui entraîne une moindre concentration du produit là où il est censé agir !

Le suivi de l’infestation parasitaire : un « must

to do »

Observer les signes potentiels d’infestation, évaluer le degré de parasitisme des animaux, établir l’existence d’une corrélation entre ces deux premiers éléments, contrôler l’efficacité d’un produit vermifuge, tout cela s’intègre dans une démarche de gestion durable du parasitisme digestif des ovins et caprins.

C’est dans cette optique que l’Arsia propose depuis maintenant 4 ans sa formule dite d’« abonnement au suivi parasitaire » qui rassemble ces spécificités. Eleveurs, vétérinaires traitants et organisme conseil travaillent de concert pour déployer de bonnes pratiques de gestion. Et le nombre d’adhérents ne cesse de grimper, preuve que cette formule apporte le soutien voulu à nos éleveurs ovins et caprins.

Figure 3: Evolution du nombre d’abonnés au suivi parasitaire.
Figure 3: Evolution du nombre d’abonnés au suivi parasitaire.

Toutes les informations relatives à cet abonnement sont disponibles sur www.arsia.be, mais également par téléphone (083/23.05.15) et par mail (ovins-caprins@arsia.be).

D’après Dr Vet. François Claine

Arsia asbl

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