Accueil Cultures

Pourquoi et comment implanter une interculture longue d’hiver après maïs, betteraves ou pommes de terre?

La plantation d’une interculture longue d’hiver procure de nombreux avantages. À condition de choisir correctement son mélange, selon sa finalité, et de ne pas négliger le semis.

Temps de lecture : 5 min

Avec la BCAE 6 (qui impose de couvrir 80 % de la superficie totale de terres arables de son exploitation pendant la période automnale) et l’éco-régime « Couverture longue des sols », l’implantation de couverts après des cultures récoltées tardivement (pomme de terre, maïs, betteraves…) va devenir plus courante. Y compris chez certains agriculteurs qui n’étaient jusqu’ici pas concernés par l’implantation des cultures intermédiaires pièges à nitrates (Cipan). Outre les avantages économiques et agronomiques générés par les couvertures de sol, cela sera également bénéfique à la préservation des sols et à la qualité de l’eau.

Quels bénéfices pour la qualité de l’eau ?

La couverture quasi permanente du sol, de la récolte jusqu’au semis de la culture suivante, procure une protection contre la battance et améliore la structure des sols sur le long terme. Elle contribue à limiter l’érosion et le transport de particules de sol et de contaminants qui y sont liés vers les eaux de surface. La couverture protège également les eaux souterraines, en jouant un rôle de piège à nitrates et d’autres éléments fertilisants.

Après une culture de maïs ou de pomme de terre, les mesures d’azote potentiellement lessivable (APL) présent dans le sol à l’automne donnent des valeurs généralement plus élevées que pour d’autres cultures. Ces valeurs d’APL traduisent un risque élevé de transfert de cet azote résiduel très soluble vers les nappes phréatiques.

Pour prélever l’excédent d’azote susceptible d’être entraîné vers les nappes durant la période hivernale, l’implantation d’une interculture après la récolte est une solution efficace.

Des essais réalisés par l’UCLouvain, entre deux cultures de maïs, ont démontré que, sous certaines conditions, même un semis tardif pouvait réduire l’APL de moitié par rapport à des valeurs obtenues sur sol nu.

Pour un prélèvement optimal, le choix du mélange ainsi que les conditions et le soin apporté au semis ne doivent pas être négligés. Selon les espèces choisies, cette couverture peut être valorisée comme engrais vert ou constituer un fourrage d’appoint au printemps.

Maximiser l’effet « engrais vert » grâce aux légumineuses

Détruire un couvert riche en légumineuses peu de temps avant l’implantation d’une culture de printemps permet de valoriser au mieux l’azote restitué par le couvert. Toutefois, le choix des espèces implantées, la date, le stade et la méthode de destruction doivent être soigneusement réfléchis pour assurer une véritable « plus-value azote » sur le système, sans impacter négativement la culture suivante.

Le processus de minéralisation doit être suffisamment rapide pour libérer l’azote durant la période de prélèvement de la culture suivante. Le rapport carbone sur azote ou « C/N » ne doit dès lors pas être trop grand. Associer des légumineuses résistantes au froid avec une graminée gélive permet de garantir l’effet engrais vert sans prendre le risque d’induire une « faim d’azote » (exemple : avoine de printemps + vesce velue d’hiver ou féverole d’hiver). Le développement des graminées à l’automne garantit l’effet « piège à nitrates » et les légumineuses, l’effet engrais vert au printemps.

Il est également nécessaire de bien raisonner la date de destruction afin de trouver le bon compromis entre une production de biomasse suffisante du couvert pour optimiser son « effet engrais vert » et la préservation des ressources (nutriments + réserves en eau) pour la culture suivante.

  Quand détruire ?

Avant une betterave ou une pomme de terre, détruire le couvert 4 à 6 semaines avant le semis permettra à la culture de profiter au mieux de l’effet engrais vert

Avant un maïs, il est conseillé de laisser passer 10 à 15 jours de chaleur à partir d’avril pour permettre le développement suffisant des légumineuses avant de détruire le couvert et de l’incorporer. L’idéal est d’ensuite attendre à nouveau 10 à 15 jours pour semer le maïs en vue d’une bonne synchronisation de la mise à disposition de l’azote.

  Comment détruire ?

L’utilisation de rouleaux, broyeurs, outils à disques, semoir « type rapide » (équipés de disques ou de dents pour un travail du sol lors du semis) facilite la décomposition de la biomasse. Les résidus doivent, par ailleurs, être enfouis en surface. Les microorganismes du sol ont besoin d’oxygène pour dégrader les débris végétaux.

Une opportunité crédible pour pallier un éventuel déficit fourrager

Certains mélanges semés tardivement (voir tableau), composés de graminées et de légumineuses non gélives permettent de bénéficier d’une coupe de qualité au printemps.

L’ajout de légumineuses capables de fixer l’azote atmosphérique dans le mélange améliore la nutrition azotée du couvert et permet, la plupart du temps, un gain de rendement. Le fourrage issu de ces couverts présente également une valeur alimentaire plus équilibrée avec une meilleure teneur en protéines.

Certaines espèces gélives peuvent être associées aux espèces hivernantes afin de maximiser l’effet piège à nitrate à l’automne (avoine de printemps, moutarde, radis fourrager, par exemple).

36-4079-Exemples de mélanges fourragers  pour un semis après le 1509-web

  Quand récolter ?

À nouveau, il est question de trouver le meilleur compromis entre attendre l’augmentation des températures pour avoir suffisamment de biomasse à récolter et un fourrage de qualité, et ne pas intervenir trop tard sous peine de pénaliser la culture suivante.

Notons toutefois que si le couvert est bien développé et riche en légumineuses en sortie d’hiver et qu’une hausse des températures permet d’envisager une fauche abondante et riche en protéines début mai, il peut être intéressant de profiter du couvert pour augmenter le stock fourrager et compenser un éventuel déficit de production du maïs en cas de printemps sec.

Plus d’info : www.protecteau.be.

A lire aussi en Cultures

Une solution pour réduire le recours aux intrants et les impacts sur l’environnement

Cultures En interaction avec 25 dynamiques mobilisant différents acteurs des filières agro-alimentaires, allant des producteurs aux consommateurs en passant par les acteurs de la recherche, du développement et de l’aval des filières (collecte, transformation et distribution), le projet européen DiverImpacts a exploré comment différentes stratégies de diversification des systèmes de cultures permettent d’en accroître la durabilité.
Voir plus d'articles