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Comment éviter la besnoitiose bovine?

Notre pays étant encore actuellement épargné par la besnoitiose bovine, il s’agit d’éviter à tout prix son introduction et sa propagation dans nos troupeaux. À cette fin, un arrêté ministériel sera très prochainement publié.

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Le principe des mesures légales reposera sur la détection et l’élimination la plus rapide possible des animaux infectés. Au cours de ces deux dernières années, l’Arsia a déjà identifié une vingtaine d’exploitations présentant des bovins infectés suite à une importation, voire un contact en pâture.

Identifiée dans presque toute l’Europe

Maladie parasitaire, connue depuis l’empire romain et répandue dans le sud de l’Europe, la besnoitiose était pourtant promise à la disparition naturelle car ne sévissant plus que dans le département de l’Ariège et ses zones voisines, dans les années 80. À partir de 90, sa progression a repris, probablement consécutive au commerce et aux mouvements d’animaux. En l’espace de dix ans, des zones d’enzootie se sont multipliées dans toute la France. Désormais, suite aux importations, elle a été identifiée dans quasi toute l’Europe.

La besnoitiose est une maladie de troupeau. Les facteurs de risque bien connus sont les achats, suivis des mélanges d’animaux d’élevages différents (estives, concours, accidents de clôtures…) et enfin le voisinage de troupeaux infectés.

Portrait du parasite responsable

Le parasite, Besnoitia besnoiti, appartient au groupe des « protozoaires » produisant des kystes, comme dans la néosporose ou encore la toxoplasmose. Mais contrairement à ces dernières, la seule transmission actuellement validée de la besnoitiose est de nature vectorielle, de bovin à bovin, sans hôte intermédiaire.

Sous leur forme invasive, les parasites inoculés mécaniquement par un insecte (voir plus loin) envahissent le sang et se disséminent ensuite lors d’une phase aigüe dans tout l’organisme, lequel déploie ses défenses. Les parasites y répondent en adoptant une forme résistante, logée dans des kystes qui les protègent. Suit alors la phase chronique avec accumulation massive dans tout le corps de ces kystes contenant chacun jusqu’à 150.000 parasites et qui ne s’arrête… qu’à la mort de l’animal. Ceci explique le haut potentiel de dissémination de la maladie. C’est au cours de son transfert vers un autre hôte que la forme résistante reprend la forme invasive… et le cycle est bouclé.

Les vecteurs du parasite, biologiques… ou non

Les vecteurs principaux sont les taons et les mouches dont en particulier la mouche piqueuse « stomoxe ». Les premiers sont dotés d’un appareil piqueur assez puissant pour percer les kystes, les secondes moins, mais sont à ce point nombreuses que la multiplicité des piqûres, là où la peau est la plus fine, sur la tête et au bas des membres, permet la transmission du parasite.

Mais il est un autre moyen de portage et transmission du parasite, qui n’est autre que l’aiguille d’injection… lorsqu’elle n’est pas à usage unique !

Apprendre à repérer la maladie

Dans notre pays, encore probablement indemne, il importe d’autant plus de connaître les signes cliniques et, en leur présence, d’appeler sans tarder son vétérinaire ! Les infections sont hélas la plupart du temps asymptomatiques, n’en générant pas moins des animaux « réservoirs ». Par contre après une incubation de six à dix jours ou plus, certains bovins, tels des « révélateurs », vont développer des symptômes, en trois phases caractérisées successivement par de la fièvre, des œdèmes et un épaississe ment cutané.

En phase aiguë, le bovin devient soudainement fiévreux et le reste pendant trois à dix jours, présente du jetage clair et des larmoiements ainsi que de la congestion. Plus précisément, l’éleveur attentif pourra relever le début d’un œdème de la tête (« tête d’hippopotame »), des plis congestifs au niveau du cou (photo principale) et des lésions hémorragiques sur la mamelle et à la base des trayons (photo ci-dessous). Plus rarement décrit, un avortement lié à la fièvre peut survenir.

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S’ensuit rapidement la phase des œdèmes, pendant une à deux semaines, au cours de laquelle la fièvre disparaît et l’œdème du fanon (photo ci-dessous) se développe, la peau est chaude et douloureuse, le bovin perd tout appétit. L’œdème gagne les membres principalement aux boulets et des crevasses apparaissent aux plis des articulations, rendant la démarche difficile.

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La phase chronique   est celle de l’épaississement cutané, en « peau d’éléphant », très marqué sur la tête, l’encolure et la face interne des cuisses ainsi que des dépilations (photos ci-dessous). À ne pas confondre avec une gale, car le bovin ne se gratte pas !

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Enfin, moyennant une bonne contention, le vétérinaire pourra constater la présence de microkystes au niveau du blanc de l’œil, signe pas toujours présent, mais caractéristique et sans appel de la nécessité de réformer cet animal… !

Garder un animal positif : quel risque ?

Dans un tel contexte, la maladie se propagera inévitablement aux autres animaux du cheptel ainsi que potentiellement aux troupeaux voisins. Si la maladie entraîne globalement peu de mortalités, les pertes économiques sont importantes : stérilité des taureaux, chute de la production laitière, amaigrissement, moins-value économique liée aux dégâts sur la peau, coût des traitements (quand ils valent la peine d’être entrepris…), non vente et achats pour renouvellement… Vivre avec la maladie coûtera bien plus qu’un assainissement.

Réformer, la seule issue pertinente

Envisager un traitement est d’un intérêt très faible, la pharmacopée étant des plus limitées vis-à-vis du parasite. Et quand bien même il permet à l’animal de se « refaire une santé », il est envisagé uniquement dans le souci de le mener au plus vite et sans trop de pertes vers la réforme. Seule bonne attitude donc : la prophylaxie sanitaire, en réformant.

Selon les résultats du dépistage, on éliminera prioritairement les premiers cas cliniques, ensuite les porteurs de kystes détectables à l’examen de l’œil, enfin les séropositifs par ordre de séropositivité décroissante.

N’achetons pas la maladie !

Pour les cheptels sains, leur protection est un enjeu sanitaire majeur… Or la besnoitiose est l’exemple type de la « maladie qui s’achète », ce qui peut être évité ! Le contrôle à l’introduction de tout bovin importé d’un pays à risque a démontré tout son intérêt et ce grâce aux outils de dépistage de plus en plus performants disponibles. Cela justifie pleinement les mesures décrites ci-après qui seront appliquées dès la parution de l’Arrêté ministériel « besnoitiose », visant à prévenir l’apparition de cette maladie en Belgique.

Bientôt sous le contrôle d’un arrêté

La besnoitiose bovine inquiète l’Arsia depuis 2018, en termes de production bovine et de bien-être animal. Les associations de lutte contre les maladies du bétail, Arsia et DGZ, en association avec les autorités sanitaires, ont réagi rapidement ce qui a permis de juguler l’émergence de la maladie, jusqu’à présent. Néanmoins la publication d’un arrêté ministériel s’imposait, pour prendre des mesures urgentes vis-à-vis de cette maladie, en pleine expansion vers le nord de l’Europe !

Une étude, menée et publiée en 2021 par l’Arsia et l’Université de Liège, rapporte la situation dans le sud de la Belgique, lorsque le parasite responsable de la besnoitiose y avait été introduit, via des importations d’animaux en provenance de la France où la maladie était déjà alors présente dans de nombreux départements, notamment au nord du pays.

Afin de protéger le cheptel belge, l’Arsia et son homologue flamande la DGZ, avaient dès 2018 lancé une action de vigilance collective, en utilisant la prise de sang « IBR » à l’achat pour tester tout bovin importé de pays considérés à risque : France, Espagne, Portugal, Italie et Suisse. Le dépistage des animaux importés a permis la détection de sujets infectés dans une vingtaine de troupeaux auxquels, dans la foulée, des mesures de contrôle de la maladie ont été proposées. Mais en l’absence d’une réglementation spécifique, ces recommandations n’ont pas toujours été implémentées mettant en péril l’objectif de ces mesures, à savoir éviter la propagation de la maladie au sein des cheptels belges. Face à ce constat et à ce risque grandissant, l’Arsia, la DGZ et l’ensemble des organisations sectorielles ont alerté les autorités sanitaires et insisté sur la nécessaire mise en place de mesures légales de prévention et de contrôle en vue d’éviter la dispersion de la besnoitiose bovine en Belgique, voire dans d’autres états membres

Une législation spécifique

Le principe des mesures légales à venir reposera sur la détection et l’élimination la plus rapide possible des animaux infectés.

Cet arrêté concernera principalement les troupeaux importateurs de bovins à risque ainsi que tout troupeau où sont détenus ou ont été détenus des bovins infectés ou des bovins « à risque ». Les troupeaux d’engraissement à l’exception des élevages de veaux d’engraissement, seront également concernés.

Voici les différentes mesures :

Dépistage obligatoire à l’importation des « bovins à risque »

Dès l’entrée en vigueur du nouvel arrêté, sera considéré comme « bovin à risque », tout bovin provenant « de » ou « né dans » un pays à risque, c’est-à-dire un pays où la besnoitiose est endémique.

Lors de l’importation d’un tel bovin, un test ELISA de dépistage de la besnoitiose devra être réalisé en combinaison au dépistage de l’IBR. Au moins jusqu’à obtention d’un résultat négatif, le bovin devra être isolé et ne pourra ni être mis en pâture, ni commercialisé, ni participer à un rassemblement.

Dépistage obligatoire des « bovins de contact »

La future législation définit un « bovin de contact » comme un bovin détenu ou ayant été détenu dans un établissement en même temps qu’un bovin infecté par la besnoitiose ou qu’un « bovin à risque » n’ayant jamais été dépisté.

Les « bovins de contact » devront être dépistés dans les douze mois suivant l’entrée en vigueur de l’arrêté ce qui permettra de réaliser les prises de sang sur ces animaux au même moment que celles du maintien du statut IBR. L’Arsia, chargée d’établir la liste de ces bovins, en informera directement l’éleveur concerné et le vétérinaire d’exploitation et ajoutera ces bovins à la liste des bovins tirés au sort pour l’IBR.

Gestion des bovins suspects et des bovins infectés

Un bovin présentant un résultat non-négatif au test de dépistage (ELISA Ac) sera qualifié « suspect de besnoitiose ». Dans ce cas, l’échantillon sera automatiquement envoyé par le laboratoire d’analyse vers le laboratoire de référence pour un test de confirmation.

Et ce n’est que si le bovin suspect obtient un résultat positif au test de confirmation qu’il sera considéré comme « infecté par la besnoitiose » .

Au « bovin suspect de besnoitiose » s’appliqueront les mêmes restrictions de mouvement que celles décrites plus haut pour les bovins à risque.

Quant aux bovins «  infectés par la besnoitiose  », ils devront être envoyés vers un abattoir dans les 30 jours suivant l’obtention du résultat positif et seront bien entendu soumis, en attendant, aux mêmes mesures de restrictions que les bovins suspects.

Mission de l’Arsia

Le département Epidémiologie et encadrement sanitaire de l’Arsia va établir la liste des élevages dans lesquels un bovin à risque a été introduit après le 1er janvier 2018, sans que les mesures prévues aient été activées. Elle informera le détenteur et son vétérinaire de ces mesures. Les élevages voisins ou ayant un lien épidémiologique seront informés des risques éventuels encourus. Enfin, dans Sanitel seront identifiés les bovins à risque, de contact, suspects ou infectés par la besnoitiose.

Pensez-y !

Il est prévu d’inscrire la besnoitiose comme un vice rédhibitoire dans les échanges entre bovins. Toutefois, cette législation n’est pas encore en vigueur pour les transactions nationales et ne s’appliquera pas dans le cadre des échanges internationaux. En cas de résultat positif à l’introduction, la transaction ne peut être annulée que soit d’un commun accord avec le vendeur, soit sur base d’une convention de vente le prévoyant et dont un modèle est disponible sur le site internet de l’Arsia.

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