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L’agroenvironnement en Wallonie en 2023 (1/3): les Maec de base progressent, mais les mesures ciblées souffrent…

Les mesures agro-environnementales et climatiques (Maec) ont connu quelques changements lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle politique agricole commune, notamment en matière d’aides allouées. L’occasion de faire le point sur ces modifications mais aussi sur l’évolution que connaissent les différentes mesures adoptées par les agriculteurs.

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Si une bonne partie des mesures déjà existantes ont été maintenues lors de la mise en place du nouveau programme agroenvironnemental wallon, d’autres ont connu quelques modifications lors de son entrée en vigueur. À titre d’exemple, celles relatives aux petits éléments du paysage ont été reprises dans le cadre de l’écorégime annuel « maillage écologique » et bénéficient d’un paiement nettement plus avantageux.

La mesure « céréales sur pied » constitue, quant à elle, un cas particulier. Elle a connu un réel succès en 2023, avec 1.472 ha couvrant la moitié des besoins estimés pour les oiseaux des champs qui l’utilisent effectivement. De nouveaux engagements ne sont cependant plus possibles mais ceux en cours se poursuivent, avec le maintien du niveau de paiement. Notons qu’une mesure analogue, mais moins attractive financièrement (1.050 ou 1.350 €/ha, très loin de couvrir la perte économique dans les meilleures terres), est accessible via l’écorégime annuel « maillage écologique ».

Quelques autres changements

D’autres modifications notables sont à épingler. Notons, premièrement, l’amélioration importante et bienvenue du paiement relatif aux « parcelles aménagées », qui passe à 2.000 €/ha.

Le plafond des superficies de « tournières enherbées » et de « parcelles aménagées » totales par exploitation passe de 9 à 25 % des terres arables. Cette évolution est très favorable. Elle permettra aux agriculteurs motivés de s’engager davantage en développant une vraie activité économique de service environnemental ; en y consacrant du temps et en développant l’expertise technique qui garantit les meilleurs résultats.

Dans les prairies, l’évolution la plus notable est négative avec une division par deux des paiements pour la mesure « autonomie fourragère ». A contrario, le paiement pour le plan d’action agroenvironnemental est modifié et est plus avantageux pour les fermes fortement engagées du point de vue environnemental. Une nouvelle Maec « Sol » est accessible depuis cette année et ce, sans intervention d’un conseiller de Natagriwal.

Du côté des races menacées, le porc Piétrain est maintenant éligible aux aides. Les primes pour les racines bovines et ovines ont été améliorées.

Le tableau joint liste les Maec en vigueur et le montant des paiements associés. Pour les détails (dispositions techniques et administratives en vigueur), il est conseillé de consulter Natagriwal (www.natagriwal.be) ou le portail de l’agriculture wallonne (https://agriculture.wallonie.be).

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Des objectifs faibles par rapport aux besoins

Comme on pourra le lire en détail dans les pages suivantes, en 2023 après de longues années sans progression, la couverture des Maec « tournières enherbées » et « prairie naturelle » progresse nettement. La reprise est aussi sensible pour la variante la moins intensive de « l’autonomie fourragère » qui soutient des fermes aux plus forts bénéfices pour l’environnement. Par contre, les « parcelles aménagées » et « prairies de haute valeur biologique », qui sont particulièrement encadrées par Natagriwal et ont un rapport coût/bénéfice très élevé, ont subi un coup d’arrêt. La variante de « l’autonomie fourragère » concernant les fermes avec une charge entre 1,4 et 1,8 UGB/ha fourrager progresse peu.

La suppression de la Maec « céréales sur pied » qui avait permis de répondre efficacement à un besoin clairement identifié pour les oiseaux des champs est particulièrement regrettable. Cet outil devrait absolument être repris avec un paiement motivant, particulièrement dans les 120.000 ha que l’on a bien localisés et qui correspondent au meilleur habitat pour les oiseaux des champs.

D’une manière générale, les objectifs des Maec pour 2028 sont faibles par rapport aux besoins. Le coup d’arrêt de 2023 pour la « prairie de haute valeur biologique » et la « parcelle aménagée » donne peu de chances de les atteindre pour ces mesures. Pour la « prairie naturelle », la priorité est d’abord de diminuer fortement les entrées et sorties de parcelles après cinq ans pour en augmenter l’effet sur la biodiversité et l’efficience.

Des solutions pour relancer la croissance

Plusieurs solutions complémentaires permettraient de relancer la croissance des mesures les plus efficaces pour rencontrer les objectifs prioritaires de biodiversité et climatiques de la Wallonie.

Premièrement, et comme cela a été fait pour les parcelles aménagées, il faudrait renforcer les paiements pour la « prairie de haute valeur biologique », « l’autonomie fourragère » et la « prairie naturelle » ; peut être sous conditions de prolongation d’engagement ou maillage écologique.

Il est ensuite nécessaire de renforcer fortement une représentation positive de la production de biens et services environnementaux chez les agriculteurs et leurs interlocuteurs sectoriels et institutionnels. Il est plus légitime de bénéficier d’aides publiques sur les hectares qui rendent plus de services à la société. Cela semble indispensable pour faire naître et croître un sentiment de satisfaction et de fierté à tirer une partie de revenu de la mise en œuvre des meilleures pratiques environnementales.

Enfin, il conviendrait de prendre les actions nécessaires pour éliminer les causes d’un ressenti extrêmement négatif de nombreux agriculteurs vis-à-vis des conditions et conséquences de contrôles de terrain ou administratifs pour lesquels les frictions semblent nombreuses. Avec clairement pour toile de fond « qu’agriculture et environnement ne font pas bon ménage » comme certains contrôleurs l’exprimeraient même explicitement.

D’après Thierri Walot

Université catholique de Louvain

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