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Évaluation des stocks belges de pommes de terre: sous l’influence des derniers arrachages

L’évaluation des stocks en cours de commercialisation reste un élément de première importance pour appréhender l’évolution des marchés. Pour la 27e année consécutive, une enquête est menée par la Fiwap, le Carah et Inagro/PCA auprès de 216 producteurs belges de pomme de terre.

Temps de lecture : 7 min

En Wallonie, 88 agriculteurs y ont répondu, avec une proportion représentative des surfaces pour chaque province. En Flandre l’enquête a permis de contacter 128 producteurs de pomme de terre de consommation.

Podium variétal modifié

En Wallonie

Sur base des estimations d’emblavements 2023 en Wallonie (41.504 ha de pommes de terre de consommation – chiffres SPW, déclarations PAC) le taux d’échantillonnage de l’enquête est de 18,5 % de ces surfaces.

En variétés industrielles, Fontane couvre plus de 55 % des surfaces et est produite par 70 % des producteurs enquêtés. Elle est suivie par Markies (13 % des surfaces) et Innovator (9 %). Challenger reste très proche du podium à 7 %. Bintje (3 %) se stabilise mais est sans doute sous-estimée. 3 variétés se situent autour de 1 % des surfaces : Daisy, SHC 909 et Magnum, mais elles sont produites par un très petit nombre de producteurs. Tout comme les 19 autres variétés industrielles reprises dans l’enquête et qui n’atteignent pas le demi-pourcent de représentation, et parmi lesquelles se maintiennent Agria, Kingsman et Lady Claire (chips).

En variétés du marché du frais  : Nicola, Alegria, Annabelle et Jazzy restent bien classées, autour de La Vie, nouvelle arrivée. Suivent Jelly, Charlotte et Venezia.

Plusieurs variétés robustes sont présentes : Beyonce et Nirvana pour l’industrie ; Allians, Cammeo, Zen, Otolia, Twinner et Maiwen pour les marchés du frais.

Selon l’enquête, la production wallonne de pommes de terre de conservation 2023 (toutes variétés confondues) est sous contrat à hauteur de 75 %. C’était 83 % l’an dernier, et 78 % en 2021. La moyenne des 5 dernières années s’élève à 79 %. Par rapport à l’an dernier, les rendements plus élevés diminuent de facto la part contractée dans la production initiale. La forte hausse des prix des contrats (de l’ordre de 5,00 €/q, soit 40 %) a permis d’augmenter légèrement les surfaces et d’accroître les volumes contractés. Plus en détail : Fontane est contractée à 75 %, Innovator 83 %, Challenger 64 %, Bintje 48 %, et les autres variétés de conservation 77 %.

Au 15 novembre, la proportion non récoltée en Wallonie était estimée à 7,5 % des surfaces plantées avec des proportions différentes entre Provinces : 3 % à Namur, 6 % à Liège, 9 % en Hainaut et 12 % en Brabant wallon. Les producteurs enquêtés estimaient à cette date pouvoir sauver encore la quasi-totalité de ces surfaces non récoltées.

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En Flandre

Le PCA/Inagro a contacté 128 agriculteurs, pour 4.452 ha, soit 8,0 % de la surface totale des pommes de terre de consommation. Les surfaces de hâtives sont stables vers 6.600 ha. Amora et Sinora dominent le segment, devant Première. En variétés de conservation, le trio de tête est dominé par Fontane (62 %, contre 61 % en 2022) largement devant Markies (7 %), Challenger, Innovator et Bintje, toutes les 3 à 5 %. Viennent ensuite SH C 909 (3 %) et Agria (2 %). Les variétés pour le marché du frais restent très marginales.

La production flamande de pommes de terre de conservation (toutes variétés) est contractée à seulement 65 % (toutes variétés), très semblable aux 2 dernières années. La moyenne des 5 dernières années s’établit à 67 %. Bintje est contractée cette année à 44 % des volumes produits (55 % l’an dernier), Fontane à 63 % (identique à l’an passé), Challenger à 46 % (en forte baisse), Innovator à 79 % (62 % l’an dernier), et les autres variétés de conservation à 74 %.

Au 15 novembre plus de la moitié des producteurs enquêtés avaient encore des pommes de terre au champ. Pour ces producteurs, les surfaces encore à récolter pesaient pour 41 % de leur superficie. Pour l’ensemble des sondés, il restait 16 % à récolter, avec des différences sous-régionales : 5 % à Anvers et Limbourg, 14 % en Brabant flamand et 25 % dans les 2 Flandres !

Production belge brute : 4,85 millions de tonnes

Compte tenu des proportions de surfaces et des rendements par variétés principales, la production brute totale 2023 de pomme de terre de consommation belge (hâtives comprises) est estimée à 4,85 Mt (tableau 3), plus élevée que chacune des 5 dernières années.

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Ce chiffre comprend les volumes encore non récoltés au 15 novembre et qui peuvent être estimés à 550.000 t (soit 11 % des surfaces). Il est donc susceptible d’être revu.

Le rendement moyen brut 2023 sortie champ (hâtives comprises) est évalué à 50,1 t/ha. C’est le rendement le plus élevé depuis 2017. La moyenne des 6 dernières années est de 45,0 t/ha.

La répartition entre (groupe de) variétés est reprise au tableau 4. La production 2023 de hâtives est évaluée à 250.000 tonnes. En variétés de conservation, Fontane fournit plus de 60 % de la production belge. Les productions d’Innovator et de Challenger sont de l’ordre de 300.000 t ; Bintje est devenue marginale mais est sans doute sous-estimée dans l’enquête.

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Noté que le rendement renseigné correspond au rendement brut sortie champ ! Il inclut donc la tare pomme de terre (vertes, difformes, crevassées, pourries) qui a été estimée entre 5 et 7 % sur base des prélèvements de référence Fiwap/Carah/PCA/Inagro/VG-LV pour les 3 principales variétés. Tare à laquelle il faut ajouter les cœurs creux, très présents en Fontane (et dans une moindre mesure en Challenger), défaut qui ne semble pas poser de problèmes majeurs en usine.

Tenir compte des pertes en stockage

Les chiffres de production n’intègrent pas les pertes en stockage, qui sont (seront) plus élevées que la normale. Des lots arrachés trop chauds en septembre ont déjà dû être déstockés, tandis que les parcelles récoltées depuis 3 semaines (tubercules, humides, crottés…) sont très difficiles (voire impossibles) à sécher. La production disponible sera donc inférieure à ces chiffres, selon le pourcentage de surfaces qui resteraient in fine non récoltées, et selon les pertes en conservation.

Selon l’enquête, 70 % du volume produit en Belgique en variétés de conservation est contracté. C’est un peu moins que l’an dernier (73 %) et qu’en 2020 (77 %), et semblable à 2021 (71 %). Fontane est contractée à 68 %, Innovator à 83 %, Challenger à 56 %, Bintje à 46 % et les autres variétés en moyenne à 93 %. Par rapport à l’an dernier, ces pourcentages sont relativement stables pour Fontane et Innovator, et en très forte baisse pour Challenger et Bintje.

Sans tenir compte des volumes non récoltés, la production belge toutes variétés confondues est très semblable aux dernières années et à la moyenne des 5 dernières saisons (4,09 Mt). Si on intègre les volumes encore au champ, la production 2023 est supérieure de 880.000 t à l’an passé, soit 22 %, et 19 % supérieure à la moyenne de 5 ans.

Très fort dégagement de récolte au 15 novembre

Les livraisons sortie champ et sortie hangar jusqu’au 15 novembre ont été très intenses cette année. Hormis les 250.000 tonnes de hâtives (qui ont traîné sur le marché jusque fin septembre), ce sont plus d’1 million de tonnes de variétés de conservation qui, au 15 novembre, avaient déjà été livrées. C’est 380.000 tonnes de plus que l’an dernier, et 310.000 tonnes de plus que la moyenne des 5 dernières saisons. Preuve que la demande est (très) active, tant sous contrats (les volumes contractés en présaison sont plus élevés suite à la forte hausse des cours) que sur le marché libre.

Les dégagements avant le 15 novembre ont ainsi atteint 1.300.000 t cette année (hâtives comprises), contre 850.000 à 1.180.000 tonnes ces 5 dernières saisons.

Estimation des stocks au 15 novembre

L’importance des surfaces non récoltées rend aléatoire l’analyse des stocks par variété. Nous nous contenterons donc de traiter toutes les variétés de conservation ensemble.

Les stocks « rentrés dans les hangars » sont estimés à 3.270.000 tonnes, très semblables à l’an passé et à la moyenne des 5 dernières saisons. Si on ajoute les volumes non récoltés, le disponible est plus important que l’an dernier (+ 500.000 tonnes, soit 15 %) et que la moyenne pluriannuelle (+ 520.000 tonnes, soit 16 %).

En bref

L’enquête a estimé à 11 % la proportion des surfaces belges non récoltées au 15 novembre, soit un volume de l’ordre de 550.000 tonnes, soit 11 % de la production totale estimée à 4,85 Mt (hâtives comprises). Il s’agit essentiellement de variétés industrielles mi-tardives (Fontane, Challenger, Markies…). Une partie de ces productions sera sans doute perdue lors de la récolte définitive ou par mauvaise conservation, sans que l’on puisse chiffrer aujourd’hui ces pertes.

Si tout est récolté et conservé, la Belgique disposera d’une récolte de 4,85 Mt, soit 880.000 tonnes de plus que l’an dernier. Les marchés apparaissent très demandeurs puisqu’ils ont déjà dégagé en début de saison bien plus de pommes de terre que ces dernières années. Ce sont évidemment les besoins industriels qui dynamisent ce dégagement, la capacité de transformation ayant encore crû récemment pour dépasser probablement les 6,5 Mt de pommes de terre par an.

Par contre en cas de perte considérable des volumes encore au champ, la production belge 2023 restera dans la ligne des années précédentes. L’enjeu de la fin des arrachages est donc majeur. Les marchés ne s’y trompent pas, les cours sur le libre ayant regrimpé rapidement au fil des pluies d’octobre et de novembre pour dépasser à nouveau les 20,00 €/q en Fontane.

D’après le Centre Pilote Pomme de terre

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