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Ne pas se presser pour travailler le sol…

L’année 2024 est encore dans nos mémoires de jardiniers. Et, enfin, nous pouvons profiter de quelques jours sans pluie en ce milieu de mars. Il a même fait un temps relativement chaud en début de mois. Toutefois, les gelées matinales nous rappellent que nous sommes encore en hiver et que le début du printemps arrive seulement. Dès lors, pouvons-nous travailler la terre pour implanter les premiers légumes ? Plusieurs éléments de réponses sont à prendre en compte, à commencer par notre propre situation.

Temps de lecture : 7 min

Gardons en tête les objectifs à atteindre pour choisir la situation qui convient le mieux à notre cas. Un sol de remblai à nette tendance argileuse ne se travaille pas comme un limon sur une pente de 10 % ou comme un sol à tendance sablonneuse, sujet au dessèchement rapide. Cependant, nos objectifs restent les mêmes, tout comme le raisonnement, seule la méthode appliquée pour travailler le sol peut différer.

Éviter la battance

La battance du sol est une forme d’érosion. Elle survient quand une quantité d’eau tombe sur un sol au point d’en dégrader sa structure en surface. Après quelques jours, celui-ci semble se refermer, battu mécaniquement par la force des eaux. Rapidement, une croûte dure se forme en surface, elle empêche les échanges gazeux et la respiration des racines.

Nous ne pouvons pas empêcher la pluie, l’arrivée d’eau venue du ciel. En revanche, nous pouvons intervenir pour éviter que de l’eau s’écoulant en surface ne vienne dans notre potager et que l’eau du potager ne s’écoule vers les surfaces périphériques. En un mot, nous pouvons favoriser la pénétration de l’eau dans le sol en appliquant trois mesures :

– assurer une couverture végétale du sol, vivante (herbage, engrais vert, cultures) ou morte (paillis, mulching) ;

– ne pas perturber l’organisation naturelle du sol en respectant la porosité. Le passage de roto fraises sur un terrain encore humide est catastrophique à cet égard ;

– surtout, respecter le sol et sa structure pour ne le travailler que lorsqu’il est bien ressuyé ;

– ne pas le piétiner, surtout lorsqu’il est humide.

Travailler son potager après une longue période humide

Après la très longue période pluvieuse de plus d’une année, la décompaction est nécessaire pratiquement dans tous les potagers. Elle se réalisera en profondeur si le sol est pris en masse, plutôt en surface s’il ne s’agit simplement que d’une battance de surface.

Si le potager est en pente, travaillons dans le sens des courbes de niveau, c’est-à-dire perpendiculairement au sens de la pente. Cela permettra de ralentir les écoulements d’eau et donc de favoriser sa pénétration.

Par ailleurs, Monsieur de La Palisse aurait pu le dire : pour éviter la compaction des sols, ne les compactons pas. Mais quand risquons-nous de le faire ?

La terre humide se comporte comme une pâte. En la compactant, nous chassons l’air qui s’y trouve dans les pores et favorisons la cohésion forte des particules. C’est comme cela qu’on s’y prend pour fabriquer des briques. Pour avoir un sol fertile, le jardinier doit éviter à tout prix d’arriver à un tel résultat.

De plus, il doit s’abstenir de tout passage sur une terre humide. Par exemple, il protège le terrain avec de la paille sur les passages d’accès à la dernière bande de poireaux à récolter en plein hiver. Cette couche de paille répartira le poids sur une surface plus large que les seules traces de pas. La pression sera réduite.

Rappelons également qu’au printemps, il faut faire preuve d’observation afin de s’assurer que le sol est bien ressuyé avant de le travailler.

La bonne organisation du potager permet de sacrifier des passages pour privilégier une très bonne structure du sol aux endroits cultivés. Le travail par bandes de 1,3 ou 1,5 m d’axe en axe le permet.

Le jardiner évite d’affiner fortement le sol, il diminuera la macroporosité et donc la fertilité générale de la parcelle.

Le remplacement du labour par une décompaction du sol sans retournement est intéressant à ce point de vue. Toutefois, le non-labour favorise l’enherbement et augmente ainsi le temps à consacrer au désherbage. À moins que d’autres techniques soient appliquées, le paillage, par exemple.

La terre reste grumeleuse même sous la pression de la main. Nous pouvons la travailler sans risquer de la  compacter en chassant l'air sous la pression des outils  et des pas.
La terre reste grumeleuse même sous la pression de la main. Nous pouvons la travailler sans risquer de la compacter en chassant l'air sous la pression des outils et des pas. - F.

Comment s’organiser en trois phases ?

Voici l’organisation du sol.

1. Une protection de surface  : c’est la couverture végétale vive ou le mulch constitué de débris végétaux qui l’assurent.

2. Une zone enrichie en matières organiques de quelques centimètres d’épaisseur. L’activité biologique y est intense parce que les échanges gazeux avec la surface permettent l’apport d’oxygène pour que les organismes vivants puissent dégrader les matières fraîches. Dans un potager, cette zone peut aller jusqu’à 15 ou 18 cm d’épaisseur dans les parties des bandes laissées uniquement à la croissance végétale. Le jardiner reste autant que possible sur les sentiers qui séparent ces bandes. La décompaction du sol peut se réaliser à la fourche à bêcher, enfoncée et manœuvrée pour créer une porosité verticale. La grelinette réalise un travail comparable.

3. En retournant le sol par le bêchage, le jardiner favorise une bonne décompaction du sol néanmoins il perturbe la protection de surface. Ce retournement est décidé lorsque l’enherbement est important. Cette opération ne peut être réalisée chaque année, mais seulement tous les 3 ou 4 ans, par exemple avant un légume racine ou des tubercules. Ce bêchage se fera à une profondeur de 15 ou de 18 cm. Il s’agit d’éviter d’enfouir trop profondément des matières organiques ; la dégradation de celles-ci exige de l’oxygène.

Une protection grâce à la couverture végétale

La couverture végétale protège la surface des effets de la pluie. L’énergie de frappe des gouttes d’eau est absorbée par cette protection. Le sol ne se ferme pas, il garde sa porosité, les échanges gazeux restent possibles. Les racines et la vie sous la terre continuent à respirer normalement.

L’eau a le temps de s’infiltrer dans le terrain. D’une part, elle ne s’écoule pas en surface en risquant d’emmener des particules de sol et la fertilité. D’autre part, l’eau emmagasinée dans le sol sera la réserve pour la croissance végétale et sa vie en cas de période sèche.

Le feuillage des végétaux joue ce rôle protecteur. Les cultures en place et les engrais verts sont les deux groupes les plus fréquents dans nos potagers.

Entre deux cultures successives, le mulching de surface, constitué de matières végétales mortes, joue un rôle comparable. Le paillage, le terreautage de surface sont deux autres exemples de dépôts végétaux. Le paillage est écarté temporairement durant l’opération de décompaction. Il est remis en place par la suite.

Les engrais verts peuvent occuper le sol entre deux cultures de légumes, ils le protègent de l’érosion et favorisent son activité biologique. Nous les semons au printemps pour les broyer avant les semis d’été. Nous pouvons aussi les semer en fin d’été pour couvrir le sol sur les zones non cultivées en automne.

Pour bien observer la porosité du sol, nous creusons une cavité d’une trentaine de centimètres de côté et apprécions sa porosité et sa compaction. C’est sur cette base que nous déciderons du type de technique que nous emploierons avant le printemps. Sur cette photo, le sol est parfaitement ameubli, le jardinier ne marche jamais sur les bandes de cultures, il reste sur les sentiers. Un simple travail de surface suffit pour préparer le lit de semis.
Pour bien observer la porosité du sol, nous creusons une cavité d’une trentaine de centimètres de côté et apprécions sa porosité et sa compaction. C’est sur cette base que nous déciderons du type de technique que nous emploierons avant le printemps. Sur cette photo, le sol est parfaitement ameubli, le jardinier ne marche jamais sur les bandes de cultures, il reste sur les sentiers. Un simple travail de surface suffit pour préparer le lit de semis. - F.

La réserve d’eau infiltrée dans le sol

L’eau de pluie pénètre dans la terre par la macroporosité. C’est le terme employé pour regrouper les interstices entre les mottes, les galeries des vers de terre, les anciennes traces des racines et les fissures apparues après le retrait des argiles. L’eau y circule essentiellement par gravité, du haut vers le bas. En occupant ces espaces, elle prend la place de l’air qui s’échappe du sol. Un sol bien foisonné permet une descente rapide de l’eau de pluie, réduisant le ruissellement de surface. Pour le jardinier, c’est important de garder cette notion en mémoire au moment de décider s’il doit décompacter le sol ou pas. C’est l’observation sur place qui guide ses gestes.

Quand l’eau est descendue dans le profil du sol, jusqu’à la profondeur explorée par les racines des légumes, elle va progressivement imbiber l a microporosité. L’eau y progresse comme dans un papier buvard, dans toutes les directions. Cette microporosité est créée essentiellement par les micro-organismes du sol. Tout ce qui favorise la vie dans le sol favorise la microporosité. C’est là qu’interviennent les apports de matières organiques végétales et les composts mais aussi l’importance de ne pas tasser le terrain par des façons aratoires ou des passages lorsqu’il est encore gorgé d’eau et qu’il n’a pas eu le temps de se ressuyer.

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