Recycler, chauler et compléter: la fertilisation du potager
Optimiser la fertilité signifie notamment l’amélioration de la gestion de l’eau, l’aération du sol et le maintien ou l’augmentation de sa richesse. Par exemple, gérer l’eau, c’est drainer pour faciliter l’évacuation des excès après de fortes pluies, mais également arroser lors de périodes critiques de la culture ou en cas de sécheresse. Si certains aspects ont déjà été abordés au sein de cette rubrique, à présent, penchons-nous sur la fertilisation du sol pour le potager.

Pourquoi fertiliser ? Les plantes parviennent à assimiler les éléments minéraux disponibles dans le sol, issus de l’activité des organismes de la flore et de la faune. Alors que qualitativement, tous les éléments nécessaires sont le plus souvent présents, quantitativement certains peuvent être en plus grand nombre que d’autres. C’est dû à l’histoire récente et ancienne des lieux.
La décomposition des matières organiques libère des éléments minéraux et les rend assimilables. La décomposition de la roche mère locale libère lentement des éléments aussi, comme depuis les siècles précédents. Les apports de compost et de fumier s’ajoutent aux matières organiques déjà présentes dans le sol.
Les prélèvements via les racines des plantes permettent la croissance végétale. Une partie sera rendue au sol après la culture, le reste est exporté pour la consommation du jardinier et de ses proches.
Les pluies, parfois abondantes chez nous, peuvent entraîner certains minéraux vers les profondeurs. Dans quelques années, ces éléments se retrouveront dans la nappe phréatique.
Si nous mesurons les apports et les retraits, nous pouvons établir un bilan pour chacun des éléments minéraux nécessaires à la croissance des plantes. L’analyse de terre donne une image de ce bilan à un moment donné.
Il y a quelques dizaines d’années, la vidange des fosses d’aisances sur le jardin constituait un apport important de fertilisant. Un complément de chaux compensait les lessivages par les pluies et l’acidification naturelle des sols de chez nous. Actuellement, c’est toujours le cas pour certains potagers. Toutefois, les usages d’évacuation des eaux usées sont différents. Une adaptation de la fertilisation en découle.
Utiliser le fumier…
Pour fertiliser, il est possible d’agir au moins de trois façons : recycler, chauler et compléter.
Concernant le recyclage, le savoir paysan et le fruit des recherches agronomiques démontrent au quotidien que le fumier ainsi que le compost sont des bases pour une bonne fertilisation de notre potager. Cela dépend, bien entendu, des disponibilités sur place. Si c’est le cas, le fumier est l’engrais de fond classique. Suivant sa composition, sa richesse en éléments minéraux diffère grandement. Pour le jardinier, ceux les plus fréquents proviennent des petits élevages de lapins, de volailles, parfois aussi d’équidés. Il comprend la paille ou la sciure qui a servi de litière fraîche auxquels se sont mélangés les excréments solides et liquides des animaux. Le tout a été mis en tas, plus ou moins composté, et sera destiné au potager. N’hésitons pas à retourner le tas plusieurs fois, cela l’homogénéise et favorise le début du compostage.
Et le compost
Le compost de matières végétales est un bon remplaçant du fumier composté. Sa valeur globale est liée à sa mixité de matières brunes et vertes. Le processus du compostage réduit d’autant mieux les risques de propagation de maladies des végétaux et de semences de malherbes que l’élévation de température durant le compostage a été marquée et soutenue. Le retournement de tas permet aux parties extérieures (température moins élevée) de se retrouver à l’intérieur lors du retournement.
Notons que l’opération peut être mutualisée : les parcs à conteneurs se chargent de récupérer les matières végétales vertes et brunes. Les intercommunales se chargent du broyage et du compostage. Le compost revient ensuite à notre disposition dans ces mêmes parcs, au prix coûtant.
Le bac de compostage devrait être disponible dans tous les potagers, sa taille dépend des quantités de matières disponibles à la maison. Ce fertilisant peut être utilisé au potager, pour les vergers et les zones ornementales du jardin. L’homogénéisation par mélange des matières est la base d’un compost de qualité. Le broyeur est l’outil complémentaire du composteur dès que des matières ligneuses sont disponibles. Pour les petits jardins, la location peut être une bonne solution.
Quand et combien en apporter ?
Les apports de fumier « bien faits » sont de l’ordre de 400 kg par are pour la sole des légumes avides de nutriments (choux, pommes de terre, etc.). Avec la rotation des légumes dans le jardin, ces apports se feront donc tous les 3 à 5 ans. Pour les légumes moyennement gourmands, 200 kg/are conviennent bien. Ceux moins gourmands ou simplement sensibles aux excès de nutriments, ne recevront pas de fumier, les arrières fumures suffisent amplement.
Le fumier composté ou le compost peuvent être épandus sur le potager chaque fois qu’une surface est libre. Pour éviter les pertes des formes d’azote lessivables par les pluies d’automne-hiver, il est conseillé de ne l’appliquer que de mi-février à fin juin.
On l’incorpore dans les premiers centimètres du sol, par un léger bêchage. On peut également le déposer en surface, laissant le soin aux micro-organismes de le décomposer et aux vers de terre de le transporter en profondeur.
Parce que nous respectons l’environnement, nous n’apportons pas de fumier ni de compost à moins de 6 m des eaux de surface, ni sur sol inondé ou enneigé.
D’autres alternatives lorsque rien n’est disponible sur place
Si le fumier et le compost ne sont pas disponibles sur place, l’une des solutions peut être le fumier séché proposé par les centres de jardinage. Il est souvent homogénéisé avant d’être vendu. Séché, la dose sera proportionnelle à la teneur en matière sèche du fumier d’origine. Les indications liées à l’emballage sont souvent proches de 1,5 kg par m², soit 150 kg/are. Faciles d’emplois, ils s’utilisent aux mêmes moments que les fumiers et composts. Ils se réhydratent avec l’humidité du sol.
L’engrais vert est le complément naturel du compost, il permet de valoriser les apports de fin d’été et de rendre la valeur fertilisante à la terre dès le printemps suivant. Nous y reviendrons en temps utile, en début d’été.
Chauler pour corriger le pH
Au niveau du chaulage, il arrive souvent que le pH du sol soit trop acide, comme c’est fréquemment le cas chez nous. C’est lié aux caractéristiques pédologiques de nos sols, aux abondantes précipitations et leur effet de lessivage. Nous pouvons corriger ce pH par des amendements calcaires, calcaro-magnésiens ou sulfo-calcaro-magnésiens. Néanmoins, cela peut prendre plusieurs années.
Corriger avec les engrais
La fertilisation du potager peut aussi être complétée par des engrais du commerce. Nous trouvons des organiques d’origine animale, d’autres d’origine végétale et des engrais minéraux classiques.
Concernant ceux d’origine animale, le guano est à base de fientes d’oiseaux. Très riche, il libère les éléments rapidement après l’épandage. Les cornes broyées, le sang séché s’emploient plutôt au printemps.
Pour les engrais organiques d’origine végétale, de très nombreux produits à base d’algues, de broyats de plantes et bien d’autres composants sont proposés pour nos potagers.
Les engrais minéraux s’utilisent à des doses limitées par unité de surface, vu leurs concentrations en éléments fertilisants. Les teneurs sont exprimées de manière standardisée. Le premier chiffre est la teneur en azote en %. Le second est la teneur en phosphore exprimée sous la forme P2O5 en %. Le troisième est la teneur en potassium sous la forme K2O exprimée en %. D’autres éléments peuvent être de teneur garantie et sont alors exprimés à la suite des 3 éléments cités ci-dessus.
Faire le point
Le jardinier expérimenté connaît bien son sol, le comportement des légumes dans ce sol, les objectifs à atteindre.
Le jardinier en herbe peut se faire aider en consultant un laboratoire d’analyse de sol. Le site https://www.requasud.be/ donne les conseils de prélèvement de l’échantillon et les adresses des laboratoires de son réseau. Il peut être intéressant de faire le point tous les 4 ou 5 ans.