Chez Fleurolex Vitroplant Production: des rhododendrons, azalées et Kalmia hors du commun, du labo… au jardin
À l’origine pépiniériste collectionneur, Roland Kersten a rapidement fait de sa passion un métier, en s’orientant vers la multiplication in vitro et la vente de plantes de terre de bruyère. Avec une spécificité qui fait sa force : axer son travail sur la diversité des feuillages et fleurs, en matière de coloris, formes ou encore parfums. Aujourd’hui, pas moins de 240 variétés figurent à son catalogue, au grand bonheur des pépiniéristes et autres amateurs.

Nichée au cœur de Ferrières, dans le Pays d’Ourthe-Amblève, la pépinière Fleurolex Vitroplant Production est spécialisée dans la multiplication in vitro et la culture de plantes de terre de bruyère. Sur place, les rhododendrons, azalées à feuilles caduques (Azalea mollis) et autres Kalmia latifolia inondent l’espace de leurs couleurs. Des nuances de verts, bien sûr, émanent de leur feuillage mais ce sont surtout les fleurs qui subjuguent les visiteurs. C’est d’ailleurs dans une palette de rouge, violet, orange… que nous retrouvons le passionné propriétaire des lieux.
À la tête de la pépinière depuis 1992, Roland Kersten est le seul producteur de plants de terre de bruyère de Wallonie à pratiquer les techniques in vitro. Un art qu’il conjugue avec son engouement pour les variétés hors du commun, qu’elles aient une floraison précoce ou, au contraire, tardive, qu’elles soient odorantes, qu’elles déploient des couleurs particulières… « Certaines variétés sont relativement communes. Pour ma part, je me consacre davantage aux spécificités, dans une optique de collectionneur », raconte-t-il.
« Collectionneur, j’aime les variétés particulières, qui sont différentes en termes de coloris, parfums… »
Ce choix lui a ouvert les portes de nombreux marchés B2B, principalement en Europe, mais aussi au-delà. « Mes jeunes plants rejoignent des pépinières en Belgique, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne en Italie, en Suède… Plus exceptionnellement, j’ai effectué des livraisons en Australie et Nouvelle-Zélande. »
Croître, petit à petit
Mais qu’a donc pu pousser Roland Kersten à se lancer dans cette aventure ? « J’ai débuté ma carrière en 1989, en tant que responsable de la production de jeunes plants au sein de la société Bioplant in Vitro, installée à Grand-Halleux (Vielsalm). Elle-même était spécialisée dans la multiplication in vitro de rhododendrons. Quelques années plus tard, en 1992, j’ai construit une première petite serre dédiée à l’élevage de jeunes plantes, achetées auprès de mon employeur. Les plantes finies étaient ensuite vendues au détail », se souvient-il.
Le pépiniériste a mené ces deux activités de front jusqu’en 2008, lorsque Bioplant in Vitro est tombée en faillite. « Chaque année, nous produisions jusqu’à 1,2 million de plants. Cependant, les installations devenaient vieillissantes et coûteuses… Poussés par la crise financière qui frappait le monde, les actionnaires ont préféré mettre un terme à l’activité. »
Dans les mois qui suivent la faillite, Roland lance son activité à temps plein, boosté par l’expérience acquise durant plus de quinze ans. « Chez Bioplant, je m’occupais principalement de l’acclimatation des jeunes plants, mais j’ai eu l’occasion de m’essayer à la multiplication in vitro durant mes études, à l’Institut provincial d’enseignement agronomique de La Reid. En 2006, j’ai construit un laboratoire qui, bien que rudimentaire, m’a permis de faire mes premiers pas avec les rhododendrons. En 2008, tout était prêt pour me lancer ! »
Au fur et à mesure des années, l’activité s’est envolée. Un second laboratoire a vu le jour, dans un garage. La surface de serre a grandi, pour atteindre aujourd’hui 1.100 m². S’y ajoute un parc à pied mère, approchant l’hectare. Au quotidien, les occupations ne manquent pas… Mais « c’est une passion, plus qu’un travail », badine notre hôte, qui affirme encore « s’amuser lorsqu’il rencontre de nouvelles variétés à intégrer au catalogue ».
Début mai, la société s’est encore modernisée en inaugurant un nouveau bâtiment, les anciennes installations devenant vétustes. Celui-ci intègre un laboratoire flambant neuf, une chambre de culture en conditions contrôlées (afin d’éviter tout risque de contamination des milieux de culture), un réfectoire et un bureau. « Disposer d’un tel équipement, c’est, en quelque sorte, un rêve qui se réalise. »
Un travail minutieux
Fleurolex Vitroplant Production dispose de toute l’expertise et de l’équipement nécessaire pour livrer des jeunes plants, de qualité constante, aux pépiniéristes spécialisés. Ces derniers les élèveront encore durant quelques mois avant d’écouler des plantes finies en conteneurs de 3 l auprès des jardineries, pépinières généralistes… Là, elles pourront enfin être achetées par tout un chacun !
En pratique, la production par micropropagation des différentes espèces se déroule en quatre phases. Premièrement, l’initiation consiste à prélever une pousse sur une plante mère et à la préparer pour la culture in vitro (découpe des feuilles, stérilisation…). Une étape qui peut se révéler chronophage ou difficile, selon les variétés. « Il faut parfois plusieurs essais avant d’obtenir le résultat souhaité », précise Roland.
La multiplication, en deuxième lieu, vise à multiplier les micro-plantules obtenues lors de la première étape par micro-bouturages successifs. « Tout cela se fait dans un environnement contrôlé, pour éviter les éventuelles contaminations. Chaque micro-bouture est minutieusement placée dans un milieu de culture spécifique, dont la composition peut différer d’une variété à l’autre. »
En troisième étape, vient l’enracinement. Après plusieurs cycles de multiplication, lorsque la quantité nécessaire de micro-boutures est atteinte, celles-ci sont plongées dans un milieu de culture contenant, entre autres, des hormones de bouturage.
Une fois les racines développées, place à la quatrième et dernière étape : l’acclimatation. Les plantes sont repiquées en alvéoles, dans un terreau acide, aéré et humide. Elles s’adaptent progressivement au milieu extérieur et débutent leur croissance, sous serre. Au bout de plusieurs mois, elles peuvent être vendues sous ce conditionnement ou repiquées en pots ronds de 11 cm de diamètre. Dans ce cas, elles poursuivent leur développement à Ferrières avant de rejoindre, un peu plus tard, les pépinières des clients.
La production annuelle varie entre 200.000 et 250.000 plants de rhododendrons, azalées et Kalmia. « Je ne produis quasi que sur commande. Les clients me transmettent leurs désidératas et nous réalisons les multiplications nécessaires pour y répondre. » Une manière de satisfaire parfaitement la demande du marché.
Un brin de programmation informatique
200.000 à 250.000 plants et… plus de 240 variétés de rhododendrons, azalées et Kalmia… Cela demande une certaine organisation. Heureusement, Roland Kersten a plus d’une corde à son arc !
« Après mes études à La Reid, j’ai effectué un cursus de deux ans en programmation informatique. Cela me sert encore au quotidien. » La pépinière est, en effet, équipée d’un programme de gestion des stocks entièrement conçu par son propriétaire. « Tout est informatisé. Cela me permet de savoir quelles variétés multiplier, de connaître l’âge exact des plants, de satisfaire les commandes… Le tout, grâce à un système de code-barres accompagnant chaque plant en vue d’en assurer l’identification permanente. » Un dispositif qui semble plus que nécessaire étant donné l’étendue du catalogue variétal et ce, d’autant que celui-ci se renouvelle constamment (10 à 15 nouveautés chaque année).
« Au quotidien, c’est une passion, plus qu’un travail ! »
Le travail, lui, est mené par le pépiniériste et trois employés à mi-temps. « Je préfère cette option que deux temps plein. Dans cette formule, si l’un est absent, l’autre ne peut gérer seul la multiplication… Ce qui mettrait en péril la production ! », explique-t-il. Un ou deux saisonniers se joignent à eux lors des pics de travail. « C’est principalement le cas au printemps, lorsque l’on entame la phase d’acclimatation et que l’on procède aussi aux opérations de rempotage. »
Quant à Roland, son travail le passionne tellement qu’il annonce déjà, le regard malicieux, qu’il travaillera au-delà de sa pension !