Politique agricole UE: une ambition environnementale et climatique peu suivie
L’ambition environnementale et climatique de la Politique agricole commune de l’UE (PAC) a été revue à la hausse, mais les plans des États membres pour s’y conformer ne sont pas fondamentalement plus verts, conclut lundi un rapport de la Cour des comptes européenne.

La nouvelle PAC (2023-2027) a offert aux États membres plus de marge de manœuvre pour transposer les objectifs écologiques ambitieux de l’UE dans leurs plans nationaux agricoles. « Tous ont profité des dérogations aux normes environnementales, et certains ont limité ou retardé l’application des mesures de verdissement requises pour obtenir des fonds européens », observent les contrôleurs financiers de l’UE.
L’une des principales innovations de la nouvelle PAC, ce sont les « éco-régimes ». Ces mesures volontaires récompensent les pratiques bénéfiques pour le climat et l’environnement. Mais souvent, ces éco-régimes ne permettent que de poursuivre les pratiques écologiques existantes, constate la Cour. Et pour les cas où ces pratiques écologiques ont pu être étendues, les données manquent pour en évaluer la valeur ajoutée.
« Avec l’assouplissement de certaines exigences liées à la conditionnalité (par exemple la rotation des cultures destinée à améliorer la qualité des sols est à présent optionnelle) en réponse aux protestations des agriculteurs en mai 2024, l’impact écologique des plans pourrait être moindre encore », ajoute la Cour.
Difficile de vérifier aussi si les plans des États membres contribuent à la réalisation des objectifs du Pacte vert, dès lors que la seule contribution mesurable est l’augmentation des surfaces cultivées en agriculture biologique. Et rien que pour cela, « l’objectif du pacte vert à l’horizon 2030 sera très difficile à atteindre ».
Concernant les gaz à effet de serre (GES), le secteur représente 13,1 % des émissions des Vingt-sept. Plus de la moitié de ces émissions proviennent du méthane émis par le bétail dans le secteur de l’élevage et 31 %, des engrais et du fumier. Pourtant, très peu de mesures des plans analysés concernent cet aspect, dit la Cour.
L’institution insiste aussi sur la restauration des tourbières, un moyen efficace de réduire les émissions de GES, mais trop peu utilisé par des pays qui disposent de vastes zones de tourbières, comme l’Irlande et la Pologne. La législation sur la restauration de la nature a été fortement affaiblie lors de son vote par les co-législateurs, cette année. L’agroforesterie est aussi mise en avant, mais les surfaces couvertes sont encore négligeables, déplore l’auditeur.
La Cour rappelle aussi que la Commission avait proposé d’inscrire dans la législation l’objectif du Pacte vert concernant la réduction des pesticides, mais en mars 2024, s’attendant à ce que sa proposition soit rejetée lors du processus législatif, elle l’a retirée…
La Politique agricole commune est l’un des plus importants piliers de l’UE. Elle représente 31 % du budget 2021-2027, et pas moins de 378,5 milliards d’euros en versements. La Belgique, de par ses spécificités institutionnelles, est le seul pays à présenter deux plans nationaux, un flamand et un wallon. Quant à savoir si cette flexibilité accrue accordée aux États membres était une bonne idée, la Cour des comptes ne se dit pas en mesure de répondre.