Voyage dans les vignes du projet VivArdent
Entre pente douce et sillon ventru, l’amplitude du paysage inonde le regard ébloui de lumières à foison. Jaillies de la terre dans un ciel bleu pâle avec des restes de gris, les vignes dégagent d’imperceptibles bruissements de douceur aussi infimes que l’effleurement d’une goutte d’eau sur une large feuille de nénuphar. Au cœur du projet VivArdent, sur les coteaux de Sprimont, le temps est entendu jusque dans ses silences, la vie s’écoute en retour avec la même délicatesse.

Posé en lisière de la commune liégeoise, ce nouveau pôle d’œnotourisme qui réunit en un même lieu tous les métiers liés à la culture, la fabrication et la commercialisation du vin, est le fruit conjoint d’un long processus de réflexion et de la volonté de quelques amis de faire découvrir au plus grand nombre les trésors du patrimoine viticole et gastronomique wallon.
Le paysage vitivinicole et le moral des vignerons français en berne
Récemment concrétisé, le projet a mûri dans l’esprit de ses deux initiateurs qui ont sympathisé, voici près de 15 ans, avec des vignerons de la région d’Uzès (Gard) qui produit plusieurs AOP (appellation d’origine protégée) et IGP (indication géographique protégée) du Pays d’Oc.
Le tandem s’ouvre à quatre autres passionnés avant de lancer l’idée d’un projet en Belgique, convaincus qu’ils étaient tous que le potentiel de développement de la filière viticole est plus important sous nos latitudes wallonnes qu’en France.
La situation délicate que traverse l’Hexagone ne peut que leur donner raison. Dans le Bordelais, les appellations les moins prestigieuses souffrent de l’effondrement des prix et de surproduction. Cette
Au niveau des exportations, si l’Hexagone conserve son avance, les ventes de vins français commencent à s’essouffler sur certains marchés. Nos voisins sont talonnés par une dizaine de challengers avec en tête le Chili et l’Australie, qui sont les pays du nouveau monde les plus agressifs commercialement.
La Wallonie, nouvel Eldorado du vin ?
Ce tableau défavorable contraste avec le champ des possibles qu’offrent les terres de Wallonie. « Aujourd’hui, les Belges boivent 400 millions de bouteilles de vin par an, mais seules 3 millions sont produites en Belgique, ce qui représente moins d’1 % du marché » développe Xavier Bioul, l’un des cofondateurs du projet.
À titre de comparaison, nos voisins allemands et luxembourgeois arrivent, quant à eux, à produire 30 % de leur consommation avec un climat sensiblement comparable au nôtre.
Pour M. Bioul, « ce pourcentage donne une idée du potentiel d’évolution existant dans notre pays ». C’est ainsi que les initiateurs du projet, qui ont investi dans la société d’exploitation de leurs partenaires français, décident de s’appuyer sur leur expérience pour planter un vignoble en Wallonie, qui s’appellera donc VivArdent, un logo et un nom qui pétillent, comme l’œil de son administrateur questionné quant à son origine et inspiration.
Nous sommes en 2021 et les associés prennent leur bâton de pèlerin en quête de terres agricoles dont les sol et sous-sols sont adaptés à la culture de la vigne.
« C’est ce qui a constitué le plus gros défi » souffle d’ailleurs Xavier Bioul qui est allé « à la rencontre d’agriculteurs non loin de mon lieu de vie, puisque j’habite à 500 m » précise-t-il, en ajoutant avoir eu la chance d’avoir pu bénéficier de l’écoute de l’un d’eux « qui a adhéré à mon idée et accepté de nous vendre une partie de ses terres ».
En 2022, les partenaires plantent 18.000 pieds de vigne sur 5 ha avant d’en ajouter, en 2024, 7.000 sur 2 ha pour atteindre le chiffre 25.000 pieds en tout.
Il faut dire que les vignobles fleurissent et se développent un peu partout en Wallonie. Sauf que tous les viticulteurs ne maîtrisent pas toujours les compétences techniques nécessaires ou ne bénéficient pas de tous les outils de vinification. C’est ainsi que les cofondateurs de VivArdent ont décidé d’établir une collaboration avec eux.
« Nous proposons du vin à façon et pouvons aussi acheter leur raisin et prendre en charge l’ensemble du processus, à savoir la transformation, la mise en bouteilles, l’étiquetage et la commercialisation » synthétise Xavier Bioul.
Le vignoble VivArdent est capable de produire suffisamment de raisins pour obtenir 50.000 bouteilles. Quant à la cuverie, elle est dimensionnée pour en produire 200.000. « C’est ce différentiel qui peut être utilisé pour rendre service aux autres viticulteurs » image la cheville ouvrière du projet.
Cette année, les gelées ont compliqué la tâche des vignerons en retardant le débourrement tandis que le volume des grappes a diminué en raison de la deuxième repousse, moins fructifère.
Les associés tablent néanmoins sur une récolte de l’ordre de 5 à 6 t de raisins « alors que l’on aurait pu en avoir quasiment dix fois plus » avance M. Bioul qui espère pouvoir vendanger, pour la première fois, au moment où vous lirez ces lignes.
Une structure, trois pôles
La volonté de s’inscrire dans la préservation de la biodiversité