Scanning du sol et hétérogénéité parcellaire (1/2): «Le Veris m’a permis de voir autrement mes parcelles»
Les satellites, drones et capteurs de rendement livrent quantité d’informations sur l’hétérogénéité du développement et de la santé d’une culture en place. Mais des données sur la variabilité intra-parcellaire peuvent aussi être tirées du sol… En effet, le soil scanning permet des mesures non invasives des paramètres et une cartographie précise pour les principaux éléments de fertilité, dont le pH, la structure, la texture, l’humidité ou encore la teneur en matière organique. Nous avons rencontré deux utilisateurs, Emmanuel Pirlot et Christophe Jolly.
Membre de la coopérative Apligeer qui rassemble les producteurs de légumes fournisseurs de Hesbaye Frost, Emmanuel Pirlot utilise depuis 2016 un outil de cartographie du sol de Veris Technologies. Celui-ci l’aide à appréhender la variabilité des parcelles sur lesquelles il cultive des légumes destinés à l’usine de Geer.
Pourquoi scanner vos parcelles ?
Quand je réalisais des analyses de sol, je recevais des résultats globaux de la parcelle sans mettre en évidence les différences, entre autres du pH, au sein de ladite parcelle. En espérant satisfaire mes attentes, j’ai adhéré à l’initiative d’Apligeer consistant à scanner les parcelles des membres.
Les légumes destinés à Hesbaye Frost doivent répondre à un cahier des charges strict. Nos parcelles, qui les portent, doivent donc afficher des caractéristiques physico-chimiques précises pour que nos productions correspondent aux attentes de l’usine. Le pH est un paramètre capital pour le prélèvement des éléments nutritifs par les légumes, notamment les épinards. Corriger celui-ci par le chaulage est donc un élément important pour contrôler la qualité des denrées produites.
Grâce aux mesures réalisées par Veris, je peux corriger la variabilité du pH avec le chaulage modulé et, ainsi, mieux contrôler la qualité des légumes.
Quelles sont les étapes entre le passage du Veris et le chaulage modulé ?
En parallèle, quatre à six d’échantillons de sol sont prélevés et analysés par le laboratoire provincial de Tinlot (Nandrin) afin qu’Agrometius puisse calibrer les mesures réalisées et établir une carte du pH, entre autres.
En collaboration avec le Cpl-Végémar, un conseil de chaulage est établi. Celui-ci est traduit par Agrometius dans une carte de modulation sur base de pixels de 10 x 10 m compatibles avec la largeur de travail de l’épandeur.
Finalement, la chaux est appliquée par un entrepreneur agricole disposant d’un épandeur équipé de la modulation de dose, piloté par la carte chargée sur le terminal du tracteur via une clé USB.
N’oublions pas qu’il faut beaucoup de patience dans ce processus et une correction du pH peut prendre plusieurs années. Avec la chaux, il est impossible d’apporter la dose nécessaire en une fois au risque d’engendrer d’autres problèmes.
Utilisez-vous les autres paramètres mesurés, comme la conductivité ou la teneur en matière organique ?
J’ai constaté, dans les rapports détaillés que nous recevons, que la teneur en matière organique ne changeait presque pas dans nos terres de Hesbaye. On pourrait juste découvrir que celle-ci a tendance à diminuer petit à petit au fil des années, un signe que l’apport de fumier ou de lisier faiblit.
Les mesures de conductivité ont permis de conduire, avec Apligeer, des essais de modulation de la densité de semis en augmentant la densité dans les taches plus argileuses et en la diminuant dans les fonds plus limoneux. L’objectif : limiter la biomasse dans les fonds et donc contenir le développement des maladies. Nous sommes cependant en période de test et attendons les mesures de rendement des machines de récolte pour évaluer ces essais.
À partir de cartes de satellite NDVI, nous avons aussi fait quelques essais en haricots dans le but de moduler les doses de fongicides, pour autant que le pulvérisateur le permette, ce qui n’est pas encore le cas du mien. Là aussi, nous évaluerons cela en fonction des rendements.
En quoi cela vous permet de progresser ?
Cela nous a ouvert les yeux sur les différences intraparcellaires. Même si nous cultivons une terre depuis toujours, le scanner a montré des variations de pH allant parfois de 4 à 7 ! Je me suis mis à chauler différemment. Avant, on apportait la même dose partout. Maintenant, avec les cartes du pH, j’applique la bonne dose au bon endroit. C’est un avantage non négligeable ! Je peux donc parler d’économie de chaux à long terme, au rythme de l’amélioration apportée par le chaulage modulé.
Sur base des autres paramètres mesurés, j’ai adapté mes pratiques culturales. Par exemple, j’essaye de
En ce qui concerne la modulation de la densité de semis, il faudra disposer de plus de données de rendement, dont le système de mesure est toujours en développement. Cette pratique pourra nous aider pour homogénéiser la culture et, sans doute, moduler les doses de fongicides appliquées avec l’aide de cartes satellitaire de la biomasse.
Au final, l’utilisation du scanner m’a vraiment permis de voir mes parcelles autrement et de progresser dans la gestion de mon exploitation.
WalDigiFarm
