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Journaliste un jour…

Deux Sillon Belge dans la boîte aux lettres : les grévistes de bpost ont enfin libéré leurs otages. Le plaisir est double ! Qu’il est bon de déchirer les couvertures plastifiées et de humer l’odeur des journaux neufs, avant de les ouvrir pour découvrir les articles !

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Mais derrière ceux-ci, qui se cache-t-il ? Les sujets nous intéressent, nous passionnent, nous instruisent, mais qui ? Qui ont écrit ces textes ? Les journalistes ne laissent en bas de page que leurs initiales, parfois leur nom, de temps en temps une photo… Mais qui sont-ils ? Comment fonctionnent-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Quel chemin de vie les a-t-il amenés à écrire et investiguer pour une revue, un quotidien, ou un journal spécialisé comme le Sillon Belge ? Il faudrait poser la question aux intéressés, mais rien n’interdit de s’imaginer leurs réponses…

Le métier de journaliste est unique en son genre, car il fait appel à diverses compétences. L’idéal est d’avoir une bonne plume, mais pas que… Un bon journaliste ne se contente pas de rapporter les faits : il les explore, les questionne et les met en perspective. Son travail ne vise pas seulement à informer, à déverser en vrac un tombereau de nouvelles, et puis -basta !- que le lecteur se débrouille ! Non ! Un bon rédacteur-reporter est capable d’analyser tout un fatras de données, de les classer par ordre d’importance, les relier entre elles pour livrer un récit cohérent, afin de raconter une histoire qui accrochera le lecteur, suscitera sa réflexion, la sympathie, l’attirera dans son monde.

Une plume aiguisée et un regard perçant ! Un bon journaliste doit posséder l’une et l’autre, avoir le don de transformer des histoires ordinaires en récits puissants qui toucheront les cœurs et les esprits, éveilleront les consciences. Mais n’est-ce point trop demander ? Dans un journal agricole, certains articles techniques n’engendrent aucune réflexion philosophique. Il n’est pas évident de rendre particulièrement sexy et transcendantaux les résultats d’un concours de vaches laitières ou de bovins viandeux ; de passionner son lectorat par un compte rendu haut en couleur du Livre Blanc des céréales ; de relater poétiquement un rapport brut de décoffrage de la commission européenne.

Il faut de l’imagination, accompagner chaque article de photos ou d’illustrations qui accrocheront les regards. « Le poids des mots, le choc des photos ». Un journaliste qui se respecte devrait dès lors être également un bon photographe, disposer d’un appareil haut de gamme -ou d’un iPhone 16 pro max… –, «avoir l’œil » pour réaliser des clichés inoubliables. Puis vient la mise en page, et là, c’est encore un autre métier !

Les articles ne sont pas seuls à occuper le terrain dans les journaux ! Il faut intercaler des publicités, lesquelles n’ont parfois rien à voir avec le sujet traité juste à côté. Avouez qu’il est drôle de disserter sur les gaz à effet de serre et leur effet délétère sur le climat, et de proposer sur la même page -vu dans Science & Vie- une publicité pour un monstrueux SUV. Reconnaissez qu’il est ahurissant de découvrir une réclame fracassante pour un produit phytopharmaceutique en plein milieu d’un reportage -lu dans une journal agricole français- consacré à une ferme biologique ! Pour ne pas nuire à leur crédibilité, les journalistes ont tout intérêt à éviter ce genre de liaisons dangereuses au sein de leurs périodiques, mais le diable se cache quelquefois dans les détails et joue de vilains tours à sa façon…

Le journalisme est tout un cirque ! Ses artistes doivent jongler avec les mots, les idées, les paroles des uns et des autres ; voltiger avec les événements, les nouveautés…, sans hésiter à jouer les funambules sur les cordes raides de situations difficiles, à braver des dangers, à faire face à l’adversité pour apporter la lumière sur des vérités souvent ignorées, sans les manipuler pour servir des intérêts malveillants. Intégrité, objectivité, courage, passion, dévouement, mais également agilité d’esprit et curiosité : ces traits de caractère dessinent la personnalité d’un bon journaliste.

Il ou elle n’est rien sans le savoir-faire, bien entendu ! Le journalisme est un métier qui s’étudie, sur les bancs des universités et surtout sur le terrain, avec l’appui d’un mentor qui connaît « les ficelles » et les pièges à éviter. Un bon journaliste apprend durant toute sa vie à satisfaire ses lecteurs, à décortiquer les faits dans leur complexité et leur richesse. Inconsciemment, il projette ses propres fantasmes entre les lignes de ses écrits, même s’il se doit de rester neutre et impartial. Il déteste voir couper des lignes à ses articles ; il tolère mal que d’autres s’immiscent brutalement dans son travail de réflexion, le contraignent à s’enfermer dans un cadre éditorialiste étriqué. Il veut rester libre et autonome ! Sinon, il n’est plus un vrai journaliste, mais un simple tâcheron écrivant.

Il ou elle n’est certes pas infaillible : il ou elle trébuche parfois et se relève. Il lui arrive de douter, mais également de s’extasier, de se dire qu’il ou elle fait le plus beau métier du monde. Écrire de bons articles est un art littéraire qui crée des émotions, instruit et raconte, prend les lecteurs par les sentiments, amuse ou fait pleurer.

Une très bonne journaliste raconte la vie, suscite des moments suspendus, ouvre des parenthèses inattendues… Journaliste un jour, journaliste toujours. Bon vent, Delphine !

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