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Pommes de terre: le fractionnement de la fertilisation, à l’épreuve du terrain

Grenera étudie le fractionnement de la fertilisation en pommes de terre. L’objectif est d’avoir moins de pertes d’azote dans l’environnement après la récolte mais aussi de permettre à l’agriculteur de faire une économie, qui pourrait être de l’ordre de 30 %.

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La culture de pommes de terre est répandue en Wallonie. Elle occupe environ 40.000 ha de terres agricoles et laisse, après la récolte, des reliquats d’azote dans le sol assez élevés. Cela s’explique de diverse manière : une faible profondeur d’enracinement, une fin de prélèvement de l’azote début septembre provoquée par le défanage et l’incorporation des fanes lors de la récolte s’accompagnant d’un travail du sol. Ce dernier est propice à une minéralisation qui peut encore être importante à cette période.

Le cumul de ces facteurs résulte en un stock d’azote, sous forme de nitrate, dans le sol conséquent. Ce qui n’est pas sans risque pour la qualité de l’eau souterraine, vu le potentiel de lixiviation de l’azote généré. L’équipe de Grenera (Gembloux Agro-Bio Tech, ULiège), membre scientifique de Protect’eau, s’est penchée sur le sujet afin de trouver des moyens pour réduire ce risque et ainsi préserver la ressource en eau.

Raisonner avant toute chose

« La première solution, c’est de bien raisonner sa fertilisation avant la plantation », avance Christophe Vandenberghe, scientifique chez Grenera. Bénéficier d’un conseil de fertilisation qui tient compte de plusieurs facteurs, tels que le précédent cultural, le reliquat d’azote minéral dans le sol en sortie d’hiver ou encore les apports d’engrais de ferme, est toujours une bonne voie de départ. Protect’eau peut fournir ce service. De même, un module « Ferti’culture » est disponible en ligne pour calculer la fertilisation optimale de manière autonome (www.protecteau.be/ferti-culture).

Ajuster les apports aux besoins réels de la culture est bénéfique à tous les points de vue. De son côté, l’agriculteur réalise des économies d’engrais tout en garantissant ses rendements. De l’autre, la ressource en eau est préservée puisque la quantité d’azote est limitée.

Fractionner l’apport de fertilisation

Pour aller une étape plus loin dans la démarche, et c’est ce que Grenera étudie, il est possible de fertiliser en plusieurs temps. Le principe consiste à apporter une première dose de fertilisation à hauteur de 70 % du conseil avant la plantation de la pomme de terre. En fonction du développement de la végétation de la culture, un deuxième apport peut être envisagé. Ce principe de fractionnement permet de prendre en compte les conditions climatiques annuelles qui ne peuvent pas être maîtrisées par l’agriculteur.

Ainsi, une année où les conditions sont favorables à la minéralisation dans le sol, l’apport de 70 % pourrait être suffisant pour répondre aux besoins d’azote de la pomme de terre. Cela permettra de minimiser le reliquat post-récolte. « Et si ce reliquat est minimisé, la part de nitrate qui pourra être potentiellement emportée par les pluies vers les eaux souterraines au cours de l’hiver sera également réduite par rapport à une fertilisation moyenne ou qui n’aurait pas tenu compte des spécificités de l’année », détaille Christophe Vandenberghe.

Pour savoir si ce complément est nécessaire ou superflu, les scientifiques proposent deux indicateurs. « Soit, on regarde le niveau de chlorophylle dans les feuilles à l’aide d’un chlorophyllomètre. L’inconvénient de cette technique est qu’elle est très chronophage. Soit, on mesure le reliquat d’azote dans la butte à un certain stade de développement de la pomme de terre. Ces deux procédures nous permettent de savoir s’il y a un besoin d’azote supplémentaire pour la culture ou non. Et dans le cas où elle en a besoin, on peut jouer sur les 30 % restants par rapport à la dose conseillée », poursuit-il.

Au début du mois de juillet dernier, sur certaines parcelles, l’équipe de Grenera a même tenté d’autres proportions. « Nous avons apporté 50 % de la dose-conseil de Protect’eau avant la plantation. Ensuite, nous avons réalisé un prélèvement dans la butte pour savoir s’il y a besoin d’un complément ou non », ajoute Florent Bachelart, technicien Grenera, spécialisé dans l’étude du nitrate dans le sol.

En fonction des caractéristiques de la parcelle et des conditions de l’année, la réduction d’intrants peut être ajustée. L’équipe peut comparer les résultats obtenus dans les différentes parcelles, en fonction d’un morceau de terrain témoin où un apport de 100 % de la dose-conseil a été fourni. La mesure de l’azote potentiellement lessivable (APL) est un incontournable au regard de la préservation de la qualité de l’eau pour évaluer l’impact de la pratique.

Trouver l’équilibre économie-rendement

Le rendement de la pomme de terre reste un autre facteur privilégié par l’agriculteur qui doit assurer une rentabilité de la culture. L’équilibre entre économie d’intrants et pertes éventuelles de rendement ne doit pas être oublié. Lorsque les conditions sont réunies, les économies d’intrants peuvent être d’au moins 30 %. Une donnée à mettre dans la balance. Cette technique de fractionnement pilotée par des prélèvements dans la butte en période de développement de la culture permet d’ajuster au mieux la fertilisation, tout en restant attentif à minimiser l’APL post-récolte.

Protect’eau

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