Des stocks libres de pommes de terre élevés dominés par Fontane
Pour la 28e année consécutive, une enquête est menée par la Fiwap, le Carah et Inagro/PCA auprès de 217 producteurs belges de pomme de terre. En Wallonie, 86 agriculteurs ont répondu à l’enquête, avec une proportion représentative des surfaces pour chaque province. En Flandre l’enquête a concerné 131 producteurs de pomme de terre de consommation.
Production belge en légère baisse
La récolte belge 2024 est estimée à 4,31 millions de tonnes (Mt), dont 235.000 tonnes de hâtives et 4,08Mt de pommes de terre de conservation (tableau 1). Malgré la hausse des surfaces de 5 %, la production 2024 était légèrement inférieure à la production effectivement récoltée l’an dernier (-2,5 %) et comparable à la moyenne quinquennale de 4,27Mt. La Belgique n’est pas parvenue à produire plus ces dernières années, alors que la capacité de transformation en Belgique a fortement progressé.
Stocks libres plus élevés, moindre proportion de Fontane
Au 1er février, il restait chez les producteurs belges environ 62 % de la récolte initiale de pommes de terre de conservation (hors hâtives) en stocks, toutes variétés confondues (tableau 2). Une proportion inférieure aux 2 dernières années (63 et 66 %), et semblable à la moyenne quinquennale de 63 %. La part libre, c’est-à-dire les volumes non concernés par un quelconque contrat, est estimée à 24 % de la production initiale, soit près de 40 % des stocks, et est nettement plus élevée que ces 3 dernières années (16 %). La moyenne quinquennale est de 17 %.
68 % de la production initiale de Fontane est encore en stock alors que la moyenne des dernières années est de 73 %. Tandis qu’on compte environ 34 % de la production initiale en stock pour Challenger (identique à l’an dernier) et 25 % pour Innovator, avec très peu de libre pour ces 2 variétés.
Tonnage en stocks plus faible que l’an dernier
Selon l’enquête, il restait de l’ordre de 2,52 millions de tonnes de variétés de conservation dans les hangars belges début février. C’est 110.000 tonnes de moins que l’an dernier, mais c’est très semblable à la moyenne des 3 dernières années (2,53 Mt). Fontane occupe 63 % des stocks (alors que cette proportion atteignait 70 % en 2024), Challenger, Innovator et Bintje occupent chacune 3 à 4 %. Avec l’apport de variétés diverses et même parfois « exotiques » dû à la pénurie de plants en 2024, le pool des « autres variétés » occupe 27 % des stocks, contre 20 % en moyenne les 3 années précédentes.
Toutes variétés confondues, les volumes libres sont estimés à 980.000 tonnes, contre 740.000 tonnes l’an dernier, 500.000 tonnes en 2023, et 640.000 tonnes en moyenne des 3 récentes années. Le stock libre actuel est le plus élevé depuis février 2018 (1,24 Mt). Il représente presque 40 % du stock total, contre 25 % en moyenne pour ces 3 dernières saisons. Les volumes sous contrats atteignent 1,54 million de tonnes, en (forte) baisse par rapport aux récentes années. Il faut remonter à février 2019 pour trouver des stocks sous contrat aussi faibles au 1er février.
Challenger : À partir d’une production initiale similaire à l’an dernier de 250.000 tonnes, Challenger a été fortement dégagée en sortie champ et en octobre (80.000 tonnes bougées, soit 1/3 de la production initiale). Il resterait actuellement moins de 100.000 tonnes dans les hangars belges. Ce stock est majoritairement contracté (61 %, soit 50.000 tonnes), tandis que les volumes libres ne concerneraient que 30.000 tonnes.
Bintje : Les stocks actuels sont très faibles et similaires à l’an dernier (de l’ordre de 100.000 tonnes), pour moitié en libre et pour moitié sous contrat. La production initiale a été écoulée intensément sortie champ (30.000 tonnes), puis plus lentement par la suite.
Innovator : L’enquête estime les stocks d’Innovator à 60.000 tonnes, similaire à l’an dernier. La moyenne des 3 dernières années est de 110.000 tonnes. Innovator se fait donc rare, ce que confirme son haut niveau de prix actuel. La part libre est faible (environ 25.000 tonnes). Les marchés ont dégagé intensivement la récolte initiale depuis la récolte (50.000 tonnes en sortie champ, 50.000 tonnes avant novembre, et 85.000 tonnes ces 2,5 derniers mois).
Autres variétés de conservation : Avec 680.000 tonnes estimées au 1er février, les stocks sont bien supérieurs à l’an dernier (550.000 tonnes) et à la moyenne triennale (530.000 tonnes). La production initiale dépassait le million de tonnes, alimentée par les variétés « exotiques » qui ont compensé le manque de plants dans les variétés classiques. Le stock actuel est sous contrat à 70 %, le volume libre représente 200.000 tonnes.
Dégagement de la récolte 2024
Entre la récolte et le 1er février, 1,80 million de tonnes de pommes de terre ont été livrées (dont 240.000 tonnes de hâtives). C’est similaire à l’an dernier, et 7 % de plus que ces 3 dernières années (1,68 Mt) en moyenne.
Avant mi-novembre, environ 770.000 tonnes de pommes de terre de conservation avaient déjà été livrées. Avec les hâtives, cela représente 1,01 Mt, soit moins que l’an passé (1,10 Mt). C’est 23 % de la récolte initiale de pommes de terre de consommation (proportion dans la moyenne des années précédentes). Ces ventes ont eu lieu pour 2/3 sous contrat et pour 1/3 en marché libre. Les variétés « autres » (parmi lesquelles de nombreuses variétés qui ne sont pas aptes à la conservation) occupent 300.000 tonnes parmi ces dégagements précoces.
Entre mi-novembre et début février, ce sont 790.000 tonnes qui sont sorties des hangars belges, contre 700.000 tonnes l’an dernier, et 670.000 tonnes de moyenne triennale. Il faut remonter à la saison 2019/2020 pour retrouver un chiffre aussi élevé. Plus des ¾ de ces volumes étaient sous contrat, une proportion bien plus élevée que ces dernières années (de l’ordre de 67 %). La différence est encore plus remarquable en Fontane, où 83 % des volumes dégagés depuis début novembre l’ont été sous contrat (c’était 66 % en moyenne ces 3 dernières années). Fontane prend la moitié des dégagements totaux sur cette période pour elle seule. Challenger et Innovator sont dégagées conformément aux années récentes.
La commercialisation de Bintje semble plus lente. Les « autres variétés » sont très fortement dégagées sur mi-novembre – début février, avec 120.000 tonnes (dont près de 75 % sous contrat) contre seulement 85.000 tonnes en moyenne triennale…
En bref
Au départ de la récolte initiale inférieure aux volumes récoltés en 2023, les marchés ont déjà dégagé les mêmes volumes que l’an dernier à la même date. Mais ce déstockage a eu lieu davantage sous contrat, et en particulier pour Fontane. De sorte que la part libre dans les stocks actuels est plus élevée que ces récentes années, en particulier pour Fontane.
Fontane domine toujours la production belge mais elle ne constitue qu’à peine 60 % des stocks actuels. Parmi les autres variétés majeures, Innovator, Challenger et Bintje se tiennent de près mais elles totalisent moins de 10 % des stocks à elles trois. C’est le pool des « autres variétés » (hors Fontane, Bintje, Innovator et Challenger) qui progresse en volume et en proportion dans les stocks actuels. La pénurie de plants l’an dernier a amené un grand nombre de variétés « exotiques » sur le marché.
Les usines ont probablement un rythme très correct d’activités, et elles prennent facilement tous les volumes offerts par les producteurs. Elles sont sans doute plus prudentes à l’achat (avec des avancements considérables de livraison de volumes sous contrat pour certaines d’entre elles) compte tenu de la compétition intense à la vente de produits finis sur les marchés mondiaux. Toutes les tonnes produites dans le nord-ouest européen restent néanmoins importantes pour leur approvisionnement sur des marchés qui se sont montrés jusqu’ici équilibrés. Comme chaque année, la période et les conditions de plantation des hâtives en mars seront déterminantes pour la fin de la saison.
