Le numérique, un outil pour se démarquer et se réapproprier la valeur ajoutée
Informaticien, éleveur, community manager… Henri Louvigny a plusieurs casquettes. Son ouverture au numérique l’a récemment amené à repenser sa manière de produire mais aussi de se différencier. Henri veut commercialiser sa viande, comme un vigneron commercialise son vin. Cap sur la Ferme Louvigny.

Quand Henri Louvigny nous accueille dans son exploitation, il se plaît à rappeler que l’élevage est une histoire de famille et ce depuis 7 générations. C’est fin des années ‘90 que l’exploitation, alors au main de son père, passe du conventionnel au bio. Une transition qui se marque par l’abandon du cheptel Blanc-bleu au profit d’abord de la Blonde d’Aquitaine, rapidement remplacée par la Limousine. Quant à Henri, s’il a toujours été baigné dans l’agriculture, il s’en éloignera de par ses études en informatique qu’il étudiera, à Liège d’abord, à Louvain-la-Neuve ensuite.
Une expérience en dehors de la ferme
« J’ai travaillé comme indépendant en informatique. J’ai réalisé différentes missions en tant que consultant pour plusieurs sociétés. »
Mais il n’oublie pas d’où il vient. Sur le côté, il développe la plateforme Agriweb qui fête ses 10 ans cette année. Une chose en amenant une autre, une entreprise de travaux agricoles (ETA) le contacte afin de créer un logiciel de gestion des ETA. C’est ainsi que Lea (Lea-agri.com) voit le jour en 2010. Sept ans plus tard, une entreprise lui achète le modèle. « D’ici quelques mois, Lea va s’arrêter pour moi. Je n’ai plus le temps ! La gestion va être déléguée. J’aimerais davantage me consacrer à l’activité de la ferme. » Une exploitation qu’il a reprise en 2015.
Développer la valeur ajoutée
Fort de ses différentes expériences, voilà donc 4 ans qu’Henri a recollé à la tradition familiale.
Il élève un cheptel de 200 animaux – une septantaine de vêlages par an –. Pour les nourrir, l’éleveur dispose de 75 ha, la première moitié pour les foins, la seconde pour les cultures. Tout est destiné à la consommation du bétail sur la ferme. « Nous essayons d’être autonomes mais nous ne le serons jamais totalement. » À Bougnimont, il n’est pas question d’agrandir l’exploitation. « Nous privilégions clairement l’augmentation de la valeur ajoutée de notre production ! », avoue Henri.
Le numérique, une question de culture
Et pour y parvenir, il compte sur un soutien de poids : le numérique. Il y a quelques années, ses connaissances en informatique et du monde agricole lui avait ouvert les portes de la Foire de Libramont avec qui il collabore étroitement pour la partie digitalisation et réseaux sociaux de l’événement.
Grâce à cette nouvelle casquette, il participe au premier Digital Boost camp orienté PME organisé il y a deux ans. L’expérience lui ouvre les yeux sur la révolution numérique. « Je n’en avais pas pris conscience. Le numérique n’est pas une histoire d’informatique, c’est une véritable culture », précise-t-il.
« L’apport du numérique a bouleversé la vision des gens sur leur consommation. À partir du moment où l’on peut tout trouver en ligne, la donne change, que ce soit pour les petits acteurs que pour les grandes enseignes. Pour nous, petites structures, c’est une opportunité de pouvoir entrer en concurrence, dans une certaine mesure bien entendu, avec les grands de la distribution. »
Etre à l’écoute du client
« En agriculture, on a toujours eu l’habitude de produire et d’ensuite chercher à écouler sa production. Or, l’expérience m’a très vite fait comprendre que le client a le pouvoir, d’où la nécessité de l’interroger exactement sur ses besoins afin de pouvoir y répondre. »
Par le biais d’une enquête, il interroge le consommateur sur les aspects qui l’importent quand il consomme
Vendre une viande comme on vend un grand cru
Mais ce travail ne peut payer sans une meilleure valorisation, sans une meilleure visibilité. Il explique sa démarche : « Les agriculteurs ne cessent d’être critiqués, leur viande est vendue en grandes surfaces comme un produit blanc, sans différenciation. Contrairement au vin, qui est hypermarketé, chaque vignoble a sa propre étiquette, son appellation… La différenciation y est très forte. »
Un constat qui le désole : « Je trouve que chaque agriculteur devrait être davantage mis en avant, tout comme les spécificités de sa production… comme on le fait pour le vin. C’est en tout cas le modèle que je veux défendre car il amène une certaine valeur ajoutée. »
Le nom et l’identité visuelle de sa ferme ont été retravaillés dans ce sens. « Ferme Louvigny, c’est mon étiquette », sourit-il.
La ferme au format numérique
Pour communiquer auprès de sa clientèle, Henri crée un site internet pour présenter dans les grandes lignes sa ferme, son activité. On y retrouve également une plateforme de vente qui reprend les informations sur la bête mise en vente, son « parcours » et le descriptif de ses colis.
La page d’un réseau social qu’il anime est davantage vouée à partager la vie de la ferme, à réagir aux attaques sur l’élevage et prévenir le consommateur des futures ventes de colis. C’est donc un outil d’information mais également marketing. « Grâce à ce média, il atteint facilement son public cible qui pourrait potentiellement lui acheter ses colis. »
Deux façons de travailler
Les colis prennent de l’ampleur
Rentrer davantage dans les villes