Il aurait pu être fermier, il a choisi d’être boulanger. « Dans la famille, on est fermier ou boulanger, ou presque ! », rigole Hervé. « J’ai toujours aimé les deux activités mais c’est finalement le métier de boulanger-pâtissier qui m’a happé. J’ai rapidement délaissé les soirées FJA pour me former auprès de mes deux oncles boulangers et, aujourd’hui, l’un d’eux me seconde et me coache dans ma propre boulangerie. J’adore ça. La boucle est bouclée ! ».
De l’agriculture, il n’a pourtant rien oublié puisque le nom de sa boulangerie n’est autre que « La Campagne » et nombre d’agriculteurs de la région le fournissent ou s’approvisionnent chez lui.
Un projet familial
Après son cursus en boulangerie-pâtisserie à Suarlée, Hervé a l’occasion de reprendre un ancien magasin de meubles dans son village natal. « Une véritable opportunité. Comme en agriculture, le métier de boulanger n’est pas toujours très accessible aux jeunes du fait des investissements importants et de la nécessité de s’établir dans un endroit suffisamment spacieux mais aussi de proximité. C’est très certainement pour cela qu’on ne trouve plus beaucoup de « vraies » boulangeries. Ici, j’avais l’espace pour installer un atelier et j’étais accessible pour les clients, un premier bon point ». L’autre élément déclencheur pour le jeune homme, c’est sa famille. Il débute son activité en 2008 avec le soutien de sa maman, Anne : « Maman est à mes côtés depuis le début, je n’en serais jamais là sans elle. Entre maman, mes frères et mon équipe, je peux dire que je suis bien entouré et je leur en suis vraiment reconnaissant ».
Un peu de nouveauté dans la tradition
Si on aime les produits de chez « La Campagne », c’est sans doute car ils sont originaux, faits maison et à base de matières premières locales et belges. « On privilégie un maximum les produits belges. Les produits laitiers et certains fromages sont issus des fermes des environs, notamment la Ferme De Vriese à Pont-à-Celles. La farine provient des moulins belges De Dobbeleer. En saison, on préfère les fruits bien des chez nous et pour les produits très spécifiques, nous travaillions également avec Bruyerre. Le type de chocolat utilisé est par exemple différent si l’on réalise de la décoration, des mousses ou des viennoiseries, il en va de même pour le beurre », explique le jeune boulanger-pâtissier.
L’un des points forts de la boulangerie est également de proposer des produits traditionnels tout en innovant : « J’ai à cœur de maintenir les produits traditionnels et plus anciens. Nous travaillons au levain et faisons par exemple pas mal de matons. Mais, ça ne nous empêche pas de nous inspirer des tendances et de proposer régulièrement des nouveautés. Il faut un peu sentir ce que souhaitent les clients. Ils aiment découvrir de nouvelles réalisations ou combinaisons de mousses mais ça ne doit pas être trop compliqué. Ils restent attachés à des valeurs sûres comme le chocolat ou la noisette. Pour l’instant, fêtes obligent, c’est la période des spéculoos, des cougnous, des bûchettes de pâtes ou des gâteaux de crème glacée mais, on propose aussi des melo-cakes ou des verrines de mousses plus exotiques et atypiques ».
La journée du boulanger, c’est la nuit !
Le boulanger commence à travailler quand nous nous arrêtons ou nous dormons. Chez Hervé, le travail de confection débute vers 18h00 pour se terminer le lendemain début d’après-midi : « En ce qui me concerne, je commence vers minuit et termine vers 14h00, je dors l’après-midi. Au fil des ans, j’ai pu acquérir du matériel et élargir ma gamme de produits. Des collaborateurs sérieux se sont joints à moi pour fabriquer tout cela. Aujourd’hui, nous sommes au total plus d’une dizaine pour la production et le service ». Pétrissage, cuisson, réalisation de mousses, de fonds de tarte, finition… chacun a sa spécialité et son horaire : « Cela nous permet de nous organiser correctement, chacun intervient au bon moment, selon ses qualités, et est responsable de son matériel mais, il y a toujours beaucoup d’entraide. De mon côté, j’ai aussi appris à déléguer même si, quand on est indépendant, on reste toujours un peu connecté et il est difficile de lâcher prise. Pourtant, quand on s’agrandit, ça fait partie du jeu sinon on reste seul et on n’avance pas. Après, il est rassurant de pouvoir compter sur une équipe solide car, comme dans tous les métiers, ce n’est pas toujours facile de trouver les perles rares. Une fois qu’on a une équipe cohérente avec une bonne entente, on en profite d’autant plus. Dans ce contexte, il est aussi beaucoup plus facile d’exprimer ce que l’on souhaite ».
Et quand on demande à Hervé si ses horaires décaler ne sont pas un frein à son développement personnel, il répond : « C’est une question d’habitude. Ce n’est pas si différent des autres métiers. Tout le monde sacrifie du temps à son travail et s’organise en fonction de ses horaires. Cela ne m’empêche pas d’être sociable ».
Évoluer et se démarquer
À l’avenir, Hervé souhaite s’employer au développement de son commerce et est très fier de la renommée acquise : « Je préfère me consacrer à une boulangerie unique. Quand je vois que notre travail plaît, que les gens reviennent, même de loin, je suis fier et j’ai envie de faire encore mieux, d’améliorer le matériel, de proposer de nouveaux produits et services, et de toucher un nouveau public. Je suis conscient qu’il s’agit d’un travail de famille et d’équipe, que chaque membre apporte sa touche, ses idées de recette, son sourire aux clients… et contribue à la qualité de nos produits ».
D. Jaunard